Paris-Nice innove cette année en proposant un chrono par équipe puis un exercice individuel conséquent et vallonné pour finir l’épreuve. Mais avant cela la première étape se court sous une pluie typique du mois de mars en Ile-de-France. Les prétendants à l’emballage massif sont extrêmement nombreux si bien qu’une partie d’entre eux se fait complètement enfermer par une vague dans les deux derniers kms et ne peuvent même pas produire leur effort, à l’image de l’habitué
Matejicek, d’
Hathaway et de
Philipsen. Devant ce grabuge,
Walshaw a été parfaitement emmené par ses équipiers et s’impose même s’il faut la photo-finish pour le départager du retour canon de
Jakobsen. Le lendemain, le contre-la-montre par équipes entre Créteil et Évry est d’abord dominé par les
Rabobank. Plus étonnant, les deux équipes françaises d’
Arkéa et de
Cofidis sont les seules à approcher le temps des bataves alors que
BikeExchange,
Lotto et
Ineos sont par exemple rejetées à plus d’une minute. Dans la dernière partie de l’épreuve, le vent forcit. Or le parcours est quasiment en ligne droite et Éole souffle de dos, ce qui avantage les ultimes candidats.
Quick-Step fait jeu égal avec
Rabobank sur la deuxième moitié de parcours pour s’immiscer sur le podium à 15’’, juste derrière
Arkéa !
UAE fait un peu mieux dans le même temps que les bretons, et l’on remarque qu’
Urrutia n’a pas été attendu dans les derniers kms,
López prenant en personne de gros relais sans se soucier de son compatriote et co-leader sur le papier… Habitués de cette épreuve, les
Uno-X écrasent tous les intermédiaires. Ils perdent cependant quelques secondes sur les
Rabobank dans les derniers kms car les norvégiens ont dû attendre leur deuxième leader et surtout cinquième membre de l’équipe,
Johannessen. Cela ne les empêche pas de prendre la tête pour 15’’, mais ils restent menacés par des prétendants pas du tout attendus à ce niveau. Pour 3’’, ce sont pourtant bien les
Décathlon-Ag2r qui délogent les norvégiens pour s’imposer ! Une nouvelle excellente performance pour la formation française, longtemps larguée dans cet exercice mais qui, cette année, était déjà montée sur le podium du TTT de l’UAE Tour.
Après 240 kms sur la troisième étape, la bosse de 7 kms à 25 kms de la ligne ne met pas à mal les sprinters malgré le tempo important.
Walshaw est de nouveau parfaitement emmené par ses équipiers. Son compatriote
Hathaway démarre de loin mais se fait remonter pour finir seulement 5e. À la photo-finish encore,
Walshaw se fait cette fois devancer par
Matejicek qui a lancé son vélo au moment opportun ! L’autre nouvelle du jour est la grosse chute qui a touché l’un des prétendants au général, qui avait remporté les deux courses qu’il avait disputé en février et qui était à nouveau parfaitement placé suite à la victoire de son équipe hier :
Aurélien Paret-Peintre ! Le français est évacué avec une minerve en raison d’une fracture des cervicales, et c’est une mauvaise nouvelle pour Ag2r qui est pour l’heure dernière du classement WT… Heureusement pour eux, leur autre leader
Romain est en jaune et a des vues sur la quatrième étape, qui peut quasiment être considérée de moyenne montagne dans les contreforts du Jura. Les Rabobank prennent le commandement des opérations dans les cols du dernier tiers d’étape.
Leemreize sacrifie ses chances au général, puis
Schamp et
Steinhauser impriment un énorme rythme dans la côte d’Échallon. L’attaque d’
Arensman à 4 kms était téléphonée et bien suivie par
Hindley,
Foss,
Ayuso,
Nathu et
Romain. Enfin côté UAE, c’est cette fois
Urrutia qui se trouve dans le bon coup au contraire de
López, en difficulté. Le peloton reste un long moment à 30’’ et se rapproche même à 20’’. Mais
Arensman est fort et repousse ses poursuivants sur la fin d’ascension tout en faisant craquer au train
Nathu,
Foss et
Urrutia… en surestimant lui-même ses propres forces. Car, dans les 500 derniers mètres d’ascension, il est enfin relayé, pour la première fois, par
Romain. Mais le rythme du français est trop élevé et
Arensman craque à son tour. Au sommet, le « peloton » n’est plus composé que de 25 coureurs et passe à 1’10’’ !
Johannessen,
Latour et
Lenny Martinez n’en font pas partie. Pointé lui à 20’’,
Arensman fait le forcing dans la descente, se rapproche à 10’’ du trio de tête avant de subir le retour de boomerang. Dans la dernière côte de 3 kms à 5%, en perdition,
Arensman est avalé par le peloton. C’est ce qu’on appelle avoir les yeux plus gros que le ventre. Devant,
Hindley secoue le cocotier.
Ayuso est décroché sur la fin d’ascension mais le jeune espagnol parvient à rentrer dans la descente. Dans le peloton, à la seconde où son jeune équipier était annoncé en difficulté,
Subirón s’est dressé sur ses pédales. Suivi par
Geoghegan Hart, le duo fait le trou sans menacer le trio qui se joue la gagne au sprint. Logiquement, maillot jaune sur le dos,
Romain lève les bras.
Subirón et
Geoghegan Hart terminent à 50’’, puis les écarts sont énormes pour le premier peloton déjà à 1’47’’ !
Arensman est parvenu à s’y accrocher mais il ne s’attendait clairement pas à ce débours quand il faisait exploser la course quelques bornes plus tôt.
López perd 1’20’’ de plus.
La cinquième étape propose une arrivée inédite à La Chaud.
Klucky et
Leemreize sont les deux bons grimpeurs d’une échappée qui n’obtiendra jamais plus de 3’30’’ de marge. Avec
Kess, les deux hommes résistent dans le premier col du final avant de s’avouer vaincus dans les terribles pentes de la montée de Laffrey. A leur poursuite, ce sont bizarrement les Cofidis et les Trek qui font le travail.
Urrutia est le premier à se dévoiler à 19 kms de l’arrivée, bien suivi par
Horta pour l’équipe nordiste. Même pas un km plus loin,
López sort aussi du peloton pour revenir sur son Champion du Monde d’équipier. La tactique est étonnante, pourrait finalement être bénéfique car le colombien revient former un trio qui pourrait collaborer… Mais au lieu de cela,
López contre ! Le vainqueur des trois grands tours bascule en tête au sommet, chassé par… son équipier
Urrutia pendant qu’
Horta fait de la patinette. « Masterclass » des UAE… Dans le groupe maillot jaune réduit à une vingtaine d’unités, les trois hommes en forme la veille prennent leurs responsabilités dans la transition roulante. Cependant le vent est fort et souffle de face, ce qui leur fait perdre des forces précieuses par rapport à leurs adversaires à l’abri. Sur un moment de temporisation, l’écart monte toutefois à 1’15’’ par rapport au trio de tête qui s’est enfin reformé. Au pied des 7 derniers kms de montée,
Oomen lâche ses dernières forces : c’est tout pour
Arensman côté Rabobank. Sous l’arche des 5 kms,
Ayuso continue d’impressionner en se dressant sur ses pédales. Le démarrage de l’espagnol fait exploser le groupe ! À sa poursuite, les jeunes sont décidément en vue car
Steinhauser imprime désormais le rythme. Dans sa roue, on ne trouve plus qu’
Arensman et
Romain ! Mais le maillot jaune s’est mis dans le rouge et explose comme un pop-corn : il est repris puis déposé par le reste du groupe ! À 2,3 kms du but,
Urrutia s’est envolé à l’avant et compte toujours une minute de marge sur les deux Rabobank qui viennent de reprendre
Ayuso.
Arensman hausse alors encore l’allure, au train. Comme la veille, le néerlandais impressionne au point de faire péter
Ayuso de sa roue. Surtout, il fond désormais sur
Urrutia.
Arensman vole sur cette fin d’ascension, reprenant une minute au champion du monde en moins de deux kms !
Urrutia en avait cependant gardé juste assez pour lui faire le sprint et ne pas se laisser déborder. Victoire pour
Urrutia, maillot jaune pour
Arensman qui a creusé d’énormes écarts pour rattraper son mauvais jugement de la veille ! Le hollandais tient sa montée référence en carrière. Les espagnols
Horta,
Subirón,
Aguinaga et
Ayuso terminent au pied du podium. Puis en neuvième place, l’on voit débarquer un énorme
Walshaw qui a tenu au milieu des grimpeurs, dans le groupe
Hindley-
TGH à deux minutes ! Ce fut plus compliqué pour
Romain, qui rétrograde au 6e rang du général, ou encore pour
Foss qui concède 3’42’’.
Sur 135 kms le sixième jour entre La Mure et Gap, les petits cols s’enchainent et le peloton ne laisse aucune chance à l’échappée.
Leemreize accélère dans la côte de la Rochette, avant-dernière difficulté du jour, pour aller chercher les points au sommet, espérant aussi profiter d’un bon de sortie de la part des favoris. C’était trop optimiste car on veut faire la peau à
Arensman. Dans l’ultime côte de Jaussauds,
Hindley suit l’accélération de
Vauquelin. Le maillot jaune saute évidemment dans la roue du quatrième du général. Mais
Arensman s’est mis dans le rouge et se fait contrer par
Horta et
Ayuso ! Les deux espagnols basculent au sommet avec une poignée de secondes d’avance sur leurs poursuivants réduits à 16 unités.
López n’en fait pas partie ni
Steinhauser, 10e du général.
Oomen est en revanche encore là et parvient à ramener les deux fuyards dans le rang. Encore impressionnant,
Walshaw a aussi tenu bien qu’il soit entamé. Dans la dernière ligne droite, il ne peut rivaliser avec
Jacky Romain qui s’impose ! Avant l’ultime chrono, les favoris peuvent récupérer car les sprinters ont une arrivée pour eux à Cannes. Les INEOS lancent trop gentiment
Walshaw qui se fait déborder au démarrage. L’anglais est fort mais il ne parvient pas à remonter tout le monde et échoue en troisième position, comme la veille. Il est devancé par son compatriote
Hathaway et par
Matejicek, qui lève les bras. Le Col d’Èze est enfin proposé dans une configuration inédite, lors d’un chrono final qui redescend sur la Promenade des Anglais. Pendant longtemps,
Engstrom occupe le fauteuil de leader. Puis deux Bianchi s’immiscent sur le podium.
Gutlederer continue de faire parler de lui depuis les Europe de l’an dernier. Mais c’est son équipier
Mei qui crée la surprise en décrochant la victoire ! Les deux hommes remontent aux portes du top 10 au général.
Walshaw, lui, continue d’impressionner en conservant facilement sa 9e place finale. La lutte pour le général concerne enfin sept hommes qui se tiennent en 1’08’’.
Cvitovic et
Romain déçoivent sur un parcours qui aurait pu leur convenir. 6e à 51’’ ce matin,
Subirón part quant à lui le couteau entre les dents. Il passe en deuxième position au sommet du col d’Èze avant de faiblir un peu dans la dernière portion et de se contenter du 4e temps. Mais il a par exemple repris plus de deux minutes à
Romain et largement assez pour passer devant le trio qui se joue la troisième place. Entre
Ayuso,
Urrutia et
Hindley, qui se tenaient en 5’’ ce matin, l’ordre reste finalement inchangé.
Ayuso montre qu’il a passé un cap dans tous les domaines et, comme sur la dernière Vuelta, lui et
Subirón accrochent tous deux un excellent général. Restait enfin le maillot jaune à attribuer.
Arensman aurait pu être en danger suite au beau chrono de
Subirón et au vu des gros écarts créés sur ce parcours. Mais le hollandais a décidément survolé cette semaine. 6e du jour, il ne rend que 10’’ à son dauphin pour remporter la plus belle victoire de sa carrière ! Après deux tops 5 sur Tirreno ou encore un podium à Québec, il passe un nouveau cap et vient peut-être d’obtenir durablement un statut de leader chez Rabobank !