Pinot vient inaugurer son maillot irisé sur les routes lombardes qui lui tiennent à cœur. Il reste à voir comment les grimpeurs auront récupéré du décalage horaire colombien, car l’immense majorité des favoris participait aux mondiaux la semaine dernière. En attendant l’explication finale, un quatuor ouvre la route comprenant
Urán. Le colombien se fait plaisir pour sa dernière course en carrière, bien qu’il n’aura jamais l’espoir d’aller au bout. Les Bahrain mènent la poursuite dans la première montée du Valico di Valcava, puis
Ulissi,
Vichot ou encore
Taranu sont éliminés sur chute dans la descente. Les montées de Consonno et de la Madonna del Ghisallo ne servent qu’à user les organismes avant le Mur de Sormano, placé à 43 kms de l’arrivée. La physionomie change dans cette terrible difficulté puisque
Oomen et
Mollema prennent la tête du peloton. Les Jumbo décident de rester unis lorsque plusieurs attaques secouent le groupe.
Andy Schleck, lui aussi pour sa dernière course en carrière, s’isole avec panache.
Power,
Dan Martin et
Horta basculent à 20 secondes au sommet, eux-mêmes 15’’ devant sept hommes :
Betancur,
De Plus et cinq Jumbo :
Oomen,
Mollema,
Felline,
Costa et
Gesink !
Bardet est en chasse et devrait rentrer dans la descente, mais les autres favoris sont déjà à plus d’une minute ! Les médaillés des mondiaux,
Pinot,
Ravasi et
Soler, sont en particulier rejetés très loin de la tête.
Sous la pluie, cette descente rapide est rendue carrément dangereuse. En se retournant pour jauger l’écart avec ses poursuivants,
Andy Schleck glisse ! Le luxembourgeois met du temps à se relever ; il désorganise les groupes en poursuite, envoyant même
Betancur dans le fossé !
Power est le seul à ne pas sembler impacté par les conditions climatiques. L’australien fait le trou pour retrouver la plaine avec 1’16’’ d’avance sur désormais six coureurs en poursuite : ses anciens compagnons
Martin et
Horta, les Jumbo
Felline,
Costa et
Gesink, et le descendeur virtuose
Bardet. 11 coureurs dont
Schleck et
Betancur, mais aussi
Quintana et
Adam Yates, sont à 2 minutes de
Power. Il reste alors 25 kms à couvrir et moins de 15 avant le juge de paix de ce monument, le Civiglio.
Costa et
Felline se sacrifient en poursuite sans revenir sur l’homme de tête. Au contraire, le groupe
Quintana/
Schleck revient à vitesse grand V. Sitôt la jonction opérée, les deux hommes ne se posent pas de question et participent à la poursuite. Très costauds, ils distancent quasiment la moitié du groupe, sur le plat, pour n’aborder la montée de Civiglio qu’avec 55’’ de retard sur
Power. Derrière, les lâchés de Sormano n’ont pas baissé les bras mais se sont tous écrasés dans la poursuite, à commencer par
Pinot, sauf deux :
Simon Yates et le tenant du titre
Marc Soler. Ces deux-là abordent le Civiglio 30’’ seulement après le deuxième groupe.
Cette dernière difficulté développe près de 4 kms à 10% de moyenne, et la course a été plus qu’usante jusqu’ici.
Power commence à montrer des signes de fatigue,
Gesink prend la tête du groupe de chasse, et
Soler effectue un retour stratosphérique dans le premier km d’ascension ! L’espagnol rattrape le groupe et vient de suite se placer dans la roue de
Gesink. Celui-ci ne veut pas le laisser récupérer. Il attaque sous l’arche des 10 kms.
Quintana est le seul à tenter de l’accrocher, sans succès.
Gesink vole dans le final de cette course qui lui a déjà souri trois fois par le passé. Il revient sur
Power, puis l’attaque à son tour pour s’isoler en tête de course ! Derrière, le groupe a explosé sous le train de
Soler. Le champion d’Espagne gère son ascension, dépose lui aussi
Power et garde
Gesink en ligne de mire. Le néerlandais tente d’empêcher son retour, mais
Soler fait l’effort dans le dernier km pour basculer avec
Gesink dans la descente finale vers Côme. En si peu de temps, les écarts créés sont énormes.
Power et
Quintana sont à plus de deux minutes, ce qui laisse tout le loisir à
Gesink et
Soler de la jouer finement. En tête au sommet, le néerlandais ne parvient pas à faire passer l’espagnol. Il tente de lui imposer les relances aux virages, auxquelles
Soler répond parfaitement.
Gesink doit finalement lancer le sprint en tête, chose faite aux 1300 mètres.
Soler ne lâche pas son sillage pour le déposer presque tranquillement aux 500 mètres.
Gesink ne parvient pas à venger la seconde place de Mollema l’an dernier ; c’est bien
Soler qui conserve son titre en étant revenu de nulle part après le Mur de Sormano franchi loin des meilleurs ! Deux minutes plus tard,
Power règle
Quintana au sprint pour le podium, récompensant sa belle offensive solitaire. Puis vient le groupe des deux malchanceux du jour, pourtant très costauds,
Betancur (5e) et
Schleck (7e).