Cette 16e étape entre Bagnères-de-Bigorre et Luz-Ardiden est la dernière occasion de creuser des écarts au général. Auparavant, 12 coureurs se détachent dans les premiers kms dont
Hathaway. Le maillot vert profite du sprint intermédiaire pour récupérer 17 points sur
Sagan. Puis c’est au tour des grimpeurs de s’illustrer dans l’Aspin.
Rui Costa,
Maison,
Mollema,
Berg,
Dunbar,
Ferrier et
Lafay accélèrent au train sans obtenir de bon de sortie de la part du peloton. Une fois n’est pas coutume, ce sont les Bianchi et non les Orica qui s’emploient pour limiter l’écart. La seule fois où ils ont agi de la sorte sur ce Tour,
Schleck avait réalisé une démonstration à Morzine. Le luxembourgeois a évidemment encore espoir de renverser le général, et veut profiter de ces ascensions pour fatiguer un
Dyke qu’il faut absolument distancer en vue du chrono ! Cet écart réduit à deux minutes inspire
Mamykin et deux Arkéa,
Vincent et
Le Lavandier, pour rejoindre la tête de course. Au sommet du Tourmalet comme au pied de Luz Ardiden, on retrouve donc 5 coureurs en tête :
Costa,
Mollema,
Maison,
Mamykin et
Vincent possèdent seulement 2’30’’ d’avance sur le peloton. Les équipiers viennent à manquer, alors
Pinot prend en personne les rênes du groupe des favoris pour ne pas laisser
Dyke se reposer.
Le maillot jaune est bientôt relayé par
Oomen, puis par
Geoghegan Hart. Les deux Jumbo écrèment drastiquement le groupe.
Pinot et
Schleck ne sont logiquement pas inquiétés par les équipiers de
Costa, et
Soler et
Barguil se font violence pour raccrocher les roues. Et c'est tout ! Dans un second groupe,
Dyke recule de plus en plus, comme
Marks et les Education First. Plein de culot,
Costa tente alors sa chance lorsque
Geoghegan Hart s’écarte à 5 kms du sommet. Le maillot blanc ne distance personne mais retombe sur
Mollema, qui se met lui aussi au service de son jeune équipier sans temps mort. Puis
Pinot reprend le manche dans les derniers lacets. Le français, lui, distance
Soler et
Barguil. Il ne reste plus que
Schleck et l’épatant
Costa dans sa roue ! Ces trois-là se disputent la victoire au sprint et c’est
Schleck, qui n’a jamais mis le nez à la fenêtre de la montée, qui s’impose ! Grâce aux bonifications, il reprend 6 secondes à
Pinot et surtout 2’49’’ à
Dyke, 18e de l’étape. Les deux hommes ont réalisé ce qu’il fallait pour espérer résister lors du chrono. Le français possède désormais 5’18’’ d’avance sur l’américain ; le plus dur semble fait. L’autre excellente opération est pour
Costa, qui réalise sa meilleure montée sur ce Tour en ayant parfaitement profité des relais de ses coéquipiers ! Il monte même sur le podium du général devant
Barguil et
Soler, à qui il est normalement supérieur sur les chronos... Les perdants du jour sont
Latour,
Rostoll et
Kruijswijk à 3’26’’, et surtout
Marks à 4’02’’.
Entre Pau et Bayonne, la 17e étape du Tour est taillée pour les baroudeurs grâce aux cols basques du Soudet et de Bagargui, avant une longue vallée pour rejoindre l’Océan Atlantique. Les baroudeurs habituels des Pyrénées,
Berg et
Costa, se glissent encore dans l’échappée avec
Chernetskiy,
Zakarin,
Oomen,
Mullen,
Le Lavandier,
Bazkhou,
Schachmann et
Delaplace. Aucun de ces 10 hommes n’est dangereux au général, mais les équipiers de
Pinot impriment pourtant un tempo très soutenu dans les différentes ascensions. Les hommes de tête roulent en sacades car ils accélèrent brutalement chaque fois que l’écart repasse sous les deux minutes.
Oomen est étonnement le premier à lâcher, bien que le néerlandais, désabusé, ne semble pas à bloc. L’écrémage se fait dans le Soudet et Bagargui, qui ne laissent qu’une soixantaine de coureurs dans le peloton dont seulement
Sagan et
Gaviria comme sprinters !
Hathaway risque donc de réaliser une mauvaise opération au maillot vert. Heureusement pour lui, l’écart monte soudainement à 5 minutes dans les tous derniers kms de Bagargui. Les Sunweb et les Deceuninck,
Alaphilippe en tête, haussent donc l’allure dans la descente et la vallée. La côte de Bonetbelchenea, à une quarantaine de kms de l’arrivée, ne développe que 1300 mètres à 5% de moyenne. Mais après tous les efforts déjà produits, certains lâchent dans cette petite difficulté. C’est le cas des équipiers de
Pinot qui se sont sacrifiés toute l’étape, et c’est surtout le cas de
Rostoll, épatant 9e du général jusque-là, et qui va tout perdre sur le dernier GPM catégorisé de ce Tour ! Il évite au moins le camouflet à
Kruijswijk, qu’il devançait toujours au général. À 20 kms de l’arrivée, 7 coureurs sont toujours en tête avec 1’40’’ de marge sur un peloton. Quand soudain la caméra s’attarde sur l’arrière du groupe :
Pinot a reculé d’un coup et ne semble pas au mieux dans les dernières positions ! L’information remonte aux oreillettes, alors
Kelderman augmente légèrement l’allure, pour voir. Sur le plat, sans vent,
Pinot baisse la tête, perd un mètre, deux, dix, cinquante. Le maillot jaune est en perdition, sans aucun équipier pour l’aider dans sa détresse. Quelle image incroyable ! Et quelle sabordage
all-time de l’équipe Orica, qui n’avait aucun intérêt à durcir la journée, surtout si
Pinot était dans un mauvais jour ! Et il reste 16 kms pour rallier Bayonne... En perdition totale, le maillot jaune voit bientôt son débours se chiffrer en minutes ! Devant, on ne se prive pas pour enterrer le français, surtout que les hommes de tête ont aussi accéléré l’allure. Ils parviennent même à se disputer la gagne. Moins bon grimpeur du lot,
Mullen s’est accroché et attaque à 8 kms de la ligne. Sous l’arche des 5 kms,
Chernetskiy sort à son tour. Il parvient à rentrer sur l’irlandais, le contrer, et s’imposer en solitaire !
Gaviria règle
Sagan et le peloton pour la 8e place 1’10’’ après le russe. Il faut ensuite attendre 4’19’’ supplémentaires pour voir
Pinot franchir la ligne. Ce n’est toujours pas cette année qu’un français succèdera à Bernard Hinault…. La France est sous le choc, la FFLose s’en donne à cœur joie, et
Pinot tombe au pied du podium, seulement 1’09’’ devant
Dyke et à 3’04’’ d’un
Schleck nouveau maillot jaune !
Deux étapes complètement plates permettent de remonter le long de l’Atlantique. Aucun vent ne perturbe la marche d’un peloton qui veut souffler. Même les baroudeurs ne sont pas motivés car seuls
Bazkhou,
Schamp et
Roux sortent du peloton. Le trio espérait plus de soutien mais se donne tout de même jusqu’au bout. En particulier,
Schamp paye son inexpérience. Il en fait beaucoup dans la dernière heure de course, pour se faire contrer par
Roux sous la banderole des 10 kms.
Bazkhou distance aussi le jeune belge sans parvenir à garder le français en ligne de mire. Le peloton est sur leurs talons, mais
Roux en a gardé sous la pédale. Il résiste jusqu’au bout pour signer sa deuxième victoire sur ce Tour, 10’’ devant un peloton réglé par
Sagan devant
Zekas et
Hathaway ! Le slovaque pourra nourrir des regrets, surtout qu’il était en plus passé complètement au travers du sprint intermédiaire dans la course au maillot vert. Le lendemain, les baroudeurs sont cette fois plus inspirés, et notamment les français. Vainqueur la veille,
Roux est de nouveau à l’avant avec
Le Bon,
Ermenault,
Gaudin,
Gougeard,
Van Gestel,
Thalmann et
Arza. Ces huit-là obtiennent rapidement 10 minutes de lest, et donc l’assurance de se jouer la gagne à Saint-Maixent-l’École.
Gaudin et
Thalmann parcourent les 20 derniers kms une vingtaine de secondes devant le reste du groupe, qui continue de collaborer. Le duo est repris par un dernier effort de
Van Gestel et
Roux en vue des 3 derniers kms. Celui-ci leur pèsera dans les jambes, car les deux hommes sont débordés dans les derniers hectomètres par
Johan Le Bon, qui s’impose !
Zekas règle le sprint du peloton devant
Hathaway, qui conforte son maillot vert. En effet,
Sagan réalise la très mauvaise opération du jour en ne marquant aucun point de la journée, largement débordé au sprint intermédiaire et à l’arrivée.
À l’aube de ce dernier contre-la-montre de 49 kms, trois coureurs peuvent encore envisager gagner le Tour :
Schleck,
Costa et
Dyke. Leur rang au général est inverse à leurs qualités dans l’effort solitaire, ce qui peut augurer d’un dénouement serré. Auparavant la lutte pour l’étape occupe les esprits, d’abord quand
Küng et
Mullen relèguent loin la concurrence, puis quand ils sont eux-mêmes devancés par
Durbridge. Un autre australien,
Rohan Dennis, jamais vu au niveau des tous meilleurs, prend les meilleurs temps aux deux premiers intermédiaires. Mais il finit moins fort que son compatriote pour être finalement moins rapide de quelques centièmes. Comme à Cap Découverte, c’est ensuite
Dumoulin qui impose sa loi. Cette fois,
Kelderman échoue à bonne distance de son rival. Les trois favoris auront donc chacun remporté un chrono sur ce Tour ! En vue du général,
Dyke fait sa part du travail en prenant la 6e place de l’étape.
Pinot pourra nourrir d’énormes regrets car il signe cette fois un bon temps à seulement 2’29’’ de l’américain, bien mieux que les 5 minutes qu’il avait concédé une sur le précédent exercice. Sans sa défaillance vers Bayonne, c’est lui qui remportait ce Tour haut la main. Le grand perdant du top 10 est aujourd’hui
Barguil, 3e ce matin mais qui rend 5’20’’ à
Dyke et 7’03’’ à
Dumoulin. Il rétrograde au 7e rang du général, une petite seconde derrière
Marks. Quant à
Schleck, il fait à peine mieux à près de 5 minutes de
Dyke. Pour 34 secondes, il passe derrière le coureur Deceuninck au classement général ! Il y a 3 semaines, on attendait un duel franco-français, et c’est finalement entre deux américains novices à ce niveau que ce Tour va se jouer !
Costa possédait 2’41’’ de marge au départ. Aux deux tiers du parcours, les trois quarts de son avance ont disparu.
Costa parvient à en remettre pour conserver finalement 30 secondes au passage de la ligne ! Pour son premier Tour, il troque son maillot blanc pour le jaune sur un chrono la veille de l’arrivée sur les Champs ! Incroyable ! En 2020, ce scénario vous rappelle-t-il quelque chose ?
La dernière étape est l’occasion des photos souvenirs. Comme l’an dernier, le seul intérêt réside dans le maillot vert où
Sagan peut encore renverser
Hathaway, qui possède tout de même 37 points d’avance. Le slovaque en reprend 6 au sprint intermédiaire, profitant cette fois à son avantage que les autres sprinters se mêlent toujours à la fête. Après trois semaines de Tour, les trains sont décimés. Pour quasiment la première fois, les Lotto de
Zekas prennent l’avantage. Ils sont seulement challengés par l’autre équipe belge pour
Gaviria. Ces deux-là sont les deux principaux sprinters à ne pas avoir levé les bras sur cette Grande Boucle.
Petit,
Hathaway et les autres sprinters ont pris le sillage du lituanien, et l’on remarque que
Sagan est mal placé en 7e position de la file.
Barbará libère parfaitement son sprinter en vue de la flamme rouge. Victorieux de deux sprints pour des places d'honneur,
Zekas n’a décidément pas ses meilleures jambes sur ce Tour quand il s'agit de la gagne car il est une nouvelle fois incapable de conclure. Il est débordé par
Bouhanni, puis deux allemands se frayent un passage au milieu de la meute. Dans une image qui rappelle Cooke et McEwen il y a 17 ans de cela, au terme de ce même Tour,
Kittel et
Zabel jouent des coudes jusqu’au jeté de vélo. Épaule contre épaule, c’est finalement le plus jeune des deux qui est déclaré vainqueur à la photo-finish !
Rick Zabel signe à la surprise générale – pas la première fois sur les Champs – la plus belle victoire de sa carrière. Il s’agit évidemment de sa première sur un grand tour, et de la quatrième d’une formation invitée sur ce Tour ! Enfin,
Hathaway est devancé de seulement deux places par
Sagan dans le fond du top 10, ce qui offre son 5e maillot vert au gallois !