Dans leur volonté de durcir la première semaine, ASO propose dès ce 4e jour une arrivée explosive à Fayence, bien connue de Paris-Nice. Les routes du Var et les écarts déjà créés inspirent de nombreux coureurs mais le peloton ne veut pas laisser une vingtaine d’hommes à l’avant. La chasse est effrénée et il faut attendre le col de la Taillude, après 55 kms de course, pour voir l’échappée se disloquer et un quintet prendre, enfin, le large. Malgré la présence de
Pigeon,
Herrada se montre le plus costaud aux différents sommets pour s’emparer du maillot à pois.
Quaade,
Pols et
Soupe n’ont pas les armes pour lutter. Derrière, Ag2r et Ineos forcent l’allure dans le col de Bourigaille. Ils ne sont déjà plus que 90 à se présenter au pied du premier passage du Mur de Fayence, à 34 kms de l’arrivée.
Skidan et
Horta y font parler leurs qualités de puncheurs. Ils avalent
Herrada, dernier rescapé de l’échappée, et font surtout exploser le peloton. À la bascule, 42 coureurs sont à la poursuite du duo, et des bons grimpeurs sont déjà distancés.
Geoghegan Hart n’a visiblement pas la même condition que l’an dernier, ni
Taranu celle du Giro.
Dyke n’est pas non plus dans le coup cette année. Côté espagnol,
Elorriaga avait déjà perdu une partie de ses illusions sur les trois premières étapes, et
Soler continue de décevoir.
Dans la deuxième montée du col de Bourigaille,
Skidan n’insiste pas mais
Power tente à son tour ! L’australien revient sur
Horta, et il oblige les prétendants au général à réagir. Pour Ag2r, le champion de France prend en personne les rênes du groupe maillot jaune.
Romain aurait pourtant pu avoir des ambitions légitimes sur cette arrivée, mais la priorité est le général de
Barguil et
Paret-Peintre. Ou plutôt, seulement de
Barguil car
Paret-Peintre est distancé par le rythme de son équipier !
Pinot,
Oomen et
Nagorski subissent le même sort, et même
Bardet et
Horta à moins de 2 kms du sommet.
Romain est impressionnant car il parvient à ramener
Power dans le rang tout en réduisant le peloton à 21 unités. Sans qu’on comprenne trop le timing,
Gaudu attaque à 400 mètres de la banderole. Le breton montre une bonne condition mais il ne distance personne hormis un coureur… Mais quel coureur :
Miguel Angel López baisse la tête ! Le leader des UAE, l’un des favoris pour le sacre final, est isolé alors que le groupe de tête s’éloigne.
Pidcock et
Romain sont électrisés par cette nouvelle donne alors qu’il reste 21 kms à couvrir. Les deux puncheurs sacrifient leurs chances pour favoriser le général de
Yates et
Barguil. Au pied des 1600 derniers mètres de Fayence, le débours du colombien se chiffre à 2 minutes !
Romain s’écarte sous la flamme rouge, incapable de répondre à l’accélération d’
Adam Yates. La sélection se fait naturellement sur ces pentes à deux chiffres, encore au détriment de certains favoris du général. Le vainqueur du Dauphiné se trouve en dernière position, juste derrière le maillot jaune et le vainqueur sortant. En d’autres termes,
Giomi,
Sundberg et
Parisse sont mal en point.
Rostoll n’est pas non plus au mieux, ni
Costa qui gère son effort sans se préoccuper de ses collègues. L’américain n’est pas attendu par
Brand qui, lui, a suivi
Barguil et
Power. L’australien prend l’avantage aux 500 mètres, mais le maillot blanc le dépasse 200 mètres plus loin.
Power ne se désunit pas et, dans un ultime effort, il parvient à reprendre le lead dans les 50 derniers mètres. Malgré les efforts consentis dans l’avant-dernier col, l’australien remporte la première victoire de sa carrière sur le Tour, et retrouve du même coup le maillot jaune qu’il avait longtemps porté l’an dernier !
Brand,
Barguil,
Yates,
Gaudu et
Padun terminent dans cet ordre dans le temps du vainqueur.
Jallas Amigó n’est pas loin non plus, alors que
Costa débourse 47’’.
Rostoll,
Parisse,
Howitt,
Sundberg et
Giomi concèdent entre 1’07’’ et 1’22’’.
López, lui, coupe la ligne avec
Taranu 3’34’’ plus tard…
Cl. étape 4 :Si la volonté était de muscler l’épreuve, les organisateurs ne s’attendaient sûrement pas à de tels écarts après 4 jours de course. Il est toutefois encore un peu tôt pour que les grimpeurs distancés se lancent à corps perdu dans une échappée matinale.
Quintana s’en frotte les mains, car il est sur le papier le meilleur grimpeur d’un gros groupe qui prend le large. Parmi ces 20 coureurs, on retrouve également le maillot à pois
Herrada, les baroudeurs
Berthet et
Bekirowski, et des grimpeurs de second rideau comme
Majka,
G.Martin et
Buitrago. Le mieux classé au général est nettement
Mühlberger, 28e à 6’01’’. L’autrichien devient d’ailleurs maillot jaune virtuel. À 30 kms du pied du Géant de Provence, 10’20’’ séparent les hommes de tête du peloton. Le rythme s’accélère ensuite pour bien se placer avant Bédoin, mais les 8 minutes restantes au matelas de l’échappée devraient suffire pour se disputer la victoire. Bien qu’on s’arrête avant la portion désertique, les pourcentages dans la forêt ne laissent aucun répit.
Berthet,
Martin et
Bekirowski s’y attellent les premiers. Les trois hommes sont repris par
Herrada,
Majka et
Quintana, puis contrés par le polonais. À 6800 mètres de la ligne,
Martin lâche la roue du coureur Arkéa. La menace vient désormais de
Berthet et
Quintana, qui sont montés à leur rythme, mais elle ne dure pas longtemps.
Majka ne fait que creuser l’écart. Irrésistible. Pas passé loin sur le Dauphiné, il concrétise ici en collant près de 3 minutes à son plus proche compagnon et en ne perdant que 1'30'' sur les meilleurs des favoris ! C’est sa deuxième victoire sur le Tour, 6 ans après la première.
Du côté des favoris, les Astana ont roulé toute la journée. Ce sont encore eux qui haussent le rythme quand
Yates attaque dès le pied du col. Le britannique est repris, puis retente sa chance avec
Gaudu,
López et
Sundberg. Lorsque
Padun et d’autres y vont à leur tour, les Jumbo se placent en tête de groupe. Désormais équipier de luxe,
Oomen rétablit une première fois la situation. À 7 kms du sommet,
Jallas Amigó et
López, et
Gaudu et
Yates en chasse-patate, y retournent. Cette fois les Jumbo reculent, et
Romain se remet au service de
Barguil. Le champion de France est impressionnant. 3e du général,
Brand est distancé à plus de 5 kms du but. Mais le maillot blanc semble gérer son effort, toujours aidé par son équipier
Ponk. Au contraire,
Power recule soudainement. Sans aucun signe avant-coureur, la sentence tombe à 2,5 kms du sommet : le maillot jaune est distancé ! Loin d’attendre son coéquipier,
Giomi attaque au contraire, quasiment au même moment. L’italien n’a pas un gros punch mais il étire le groupe et ramène tout le monde sur
López. Seul
Jallas Amigó navigue encore quelques mètres devant. Si son accélération est peu tranchante,
Giomi parvient en revanche à la faire durer. En vue de la flamme rouge, il se détache enfin avec
Barguil. Le second de l’an dernier profite au maximum du travail de l’italien, puis le crucifie dans le dernier km. Il signe la belle opération parmi les favoris car il colle 27’’ à
Giomi et
Jallas Amigó, et 43’’ au premier « groupe ». Celui-ci est composé de
Costa,
Latour et
Sundberg pour les leaders. Le suédois est accompagné de son équipier
Myrseth, tandis que
Soler et
Brkic n’ont pas attendu leurs propres leaders. Ou peut-être ne se sont-ils simplement pas rendu compte qu’ils avaient accusé une cassure juste avant le fameux replat du Chalet Reynard. 16 secondes supplémentaires sont décomptées à une dizaine de coureurs. Viennent ensuite les perdants du jour, passés inaperçus lorsque la bagarre faisait rage. Pourtant
Parisse et
Rostoll se sont fait distancer juste après
Power pour perdre 2’06’’ sur
Barguil ! Les deux jeunes se sont même fait déposer par un
Brand meilleur gestionnaire, qui conserve sa place dans le top 10 et conforte de manière inattendue son maillot blanc. Enfin
Power, si impressionnant la veille, connait un dur retour de bâton à plus de 2’30’’. L’australien est à son tour dépossédé de son paletot jaune au profit de…
Pierre Latour ! Discret mais régulier, le drômois donne enfin une impulsion positive à sa saison. Il devance de 32’’
Padun et
Barguil, qui parait le plus en forme pour l’instant.
Sundberg,
Giomi et
Brand sont aussi sous la minute.
Cl. étape 5 :Les prétendants au général ne sont pas au bout de leurs peines car, bien que le profil de la sixième étape soit plat, il longe la Méditerranée. Et dans cette région, le vent est souvent de la partie. Cette journée ne fait pas exception.
Cuadros,
Calmejane,
Cardis,
Jauregui,
Van den Brande et
Duchesne décident de passer une journée moins tendue à l’avant. Vers la mi-course, le rythme du peloton augmente car on se rapproche du sprint intermédiaire. Mais surtout car la banderole est placée à Sète et, dans la foulée, les routes seront très exposées le long de l’étang de Thau.
Joachim remporte le sprint du peloton et reprend 6 points à
Hathaway. Puis les Bora et les Lotto mettent le turbo dès la sortie de la ville. BORDURES ! Le peloton se morcelle aussitôt. 30 kms plus loin, ils ne sont plus que 60 à composer le groupe de tête. Les différents groupes attardés se sont rejoints dans un second peloton comprenant,
Romain,
Alaphilippe,
Madouas,
Ponk, et pas mal de poisson-pilotes comme
Owen,
Balkan,
Pinaud ou
Schir. Beaucoup plus loin, une trentaine de coureurs ont totalement lâché prise. Parmi eux, on retrouve
Robert Power ! Maillot jaune hier matin, l’australien ne s’est pas remis de sa déconvenue du Chalet Reynard, peut-être plus mentalement que physiquement. La fin d’étape est plus classique. Les hommes placés au général n’ayant pas été piégés, ce sont les équipes de sprinters qui roulent pour reprendre l’échappée et empêcher le retour de quelques hommes rapides. Dans le final, les Jumbo forment leur train.
Hathaway est emmené par
Kox et
Dekker, et tous se reportent dans sa roue. Tous ? Non ! Un irréductible australien trace sa route sur la gauche de la chaussé, remonté par
Consonni.
Ewan surprend
Hathaway qui fait confiance à son train, mais ses adversaires se reportent derrière les deux Ineos qui produisent leur effort. C’était la bonne décision car le maillot vert est incapable de remonter son débours et ne finit que 8e. Loin devant,
Ewan explose une nouvelle fois. Ses adversaires pourront dire merci à son impatience, en particulier
Sagan qui le déboîte sous la flamme rouge. Mais le slovaque finit aussi par coincer, tandis qu’un maillot Qhubeka déboule au centre de la chaussée.
Nacer Bouhanni s’impose ! Sa deuxième victoire en carrière sur le Tour, des années après la première !