Leon40 a écrit:Beobachter a écrit:Ton Autrichien ou ton type des Sudètes, il sera ultramajoritairement nationaliste allemand au sens où si tu lui demandes à quelle nation il se rattache, il va répondre l'Allemagne. Mais une telle position ("moi je veux vivre dans cet Etat") est complètement différente que de dire que TOUS les Allemands doivent vivre dans un même Etat.
A partir directement sur le pangermanisme, cela revient à ne s'intéresser qu'à une partie de l'ensemble.
Sauf que que l'Anschluss et le rattachement des Sudètes sont deux choses différentes.
Les Autrichiens de 1938 sont déjà dans une nation allemande uniforme. Donc c'est quoi ta nuance ? Si ce n'est que du nationalisme, ben c'est déjà ok pour eux. L'Anschluss est bien une concrétisation du pangermanisme venant d'Allemagne, pas un soulèvement des Autrichiens pour vivre dans un État-nation... puisque c'est déjà le cas depuis la fin de la double monarchie.
Quand aux Allemands des Sudètes, tu laisses entendre qu'il se contenterait d'un État à eux à côté de la Tchécoslovaquie et de l'Allemagne ou qu'ils voudraient migrer vers l'Allemagne. C'est totalement faux, ils veulent vivre aux Sudètes, en Allemagne. Donc, pourquoi ce serait du nationalisme et pas du pangermanisme. J'avoue ne pas comprendre.
Ce qu'il n'y a pas eu en 1918 (du moins dans les mêmes proportions) et qu'il y aura en 1945/46, ce sont les immenses transferts de population. Des familles entières vont errer sur les routes au grès des évolutions de frontières afin d'intégrer LEUR État-nation. C'est particulièrement vrai pour l'Allemagne et la Pologne avec toutes les imperfections dues à l'implantation des régimes totalitaires communistes.
"Une nation allemande" sauf que précisément ce n'est ici pas "une" mais "LA nation allemande". Les Autrichiens se réclamaient d'un tout plus grand qu'eux-mêmes. L'Etat-nation par définition est un, il ne peut pas de démultiplier. Sauf à devenir un Etat-nation autrichien de la nation autrichienne (et donc pas allemande), l'Etat autrichien n'était pas un Etat-nation puisque la population de cet Etat se réclamait d'une nation bien plus vaste et basée sur un Etat voisin. En l'occurrence, l'Etat-nation était l'Allemagne et on a interdit à des territoires constitués et homogènes de rejoindre l'Etat-nation dont ils se considéraient part.
Pour ce qui est de la distinction je ne comprends pas que ce que tu ne comprends pas. Pour les types des Sudètes, leur territoire seul n'existe pas, ça n'a aucun sens si ce n'est celui d'être une région, un territoire, rien de plus. De même pour l'Autriche. En gros, ces territoires sont comme la Bavière et la Saxe, ils pourraient vivre seuls mais ils se réclament d'une entité plus grande. Pour les Sudètes comme l'Autriche, il paraissait normal de s'interroger sur ce qui faisait sens pour eux. Le sens partagé à l'époque était qu'ils faisaient de la nation allemande. Ainsi, de leurs perspectives, il était naturel de considérer rejoindre la nation allemande. On est ici dans de la construction nationale: des entités (personnes, communautés, régions) ont un sentiment d'adhésion profonde à quelque chose de plus grand et souhaite voir ce sentiment se transformer en quelque chose de plus concret.
La perspective ici est purement et simplement celle des concernés. Ils ne souhaitent décider que pour eux-mêmes.
Ce qui n'a rien à voir avec une perspective pangermaniste qui, elle, est une perspective totale: TOUS les Allemands doivent appartenir à l'Etat allemand. Ici, cela revient à (vouloir) décider pour les autres.
Ainsi, les types des Sudètes ou les Autrichiens, tous très largement nationalistes allemands étaient très loin d'être tous des pangermanistes. A aucun moment, ils ne souhaitaient décider pour les autres. En gros, ton Autrichien moyen, il se fout que l'Allemand des Sudètes vive dans le territoire de la République allemande ou en République Tchèque: c'est le problème des Sudètes, pas le sien. Et inversement, le type des Sudètes, c'est le devenir de sa région qui lui importe: ce que font les Autrichiens est leur choix, il s'en fout globalement.
Ton pangermanisme découle d'un certain nationalisme allemand mais il ne lui est pas nécessairement équivalent, très loin de là.
Sur les transferts de population, j'ai l'impression (peut-être erronée) que tu fais comme si ça découle d'un libre choix des concernés. On en était quand même très loin.
Mais là où tu as raison c'est que tous ces transferts de population et cette relative homogénéisation des Etats après ça a conduit à renforcer de vrais Etats-nations là où jusqu'alors les mélanges entre communautés étaient sources de tensions du fait des velléités nationalitaires puis nationalistes.
Et j'ai l'impression que justement tu ne prends pas en considération cette différence des situations suivant les cas en question. L'Allemagne, l'Italie, la Hongrie étaient expansionnistes car leurs Etats (leurs territoires) ne recoupaient pas leurs nations. L'Espagne elle avait déjà le territoire qu'elle voulait par rapport à sa perception de la nation espagnole. Dès lors, il n'y avait juste aucune raison particulière de faire preuve d'un expansionnisme nationaliste virulent. Tout le contraire d'Etats qui considéraient que leurs territoires ne correspondaient à leurs frontières nationales.
On peut d'ailleurs poursuivre le raisonnement à aujourd'hui. On voit bien que des Etats-nations solidement constitués n'ont plus de raisons d'être expansionnistes. Par contre, par contre on voit bien que les minorités nationales et autres situations d’enchevêtrement communautaires sont les plus explosives. Prenons la Hongrie par exemple. On est fondamentalement dans de l'expansionnisme pur et simple, certes à la sauce 21ème siècle, donc par chance avec une renonciation au recours aux armes, mais on reste dans de l'expansionnisme. Les actions hongroises et plus globalement l'idéologie nationale de ce pays sont tournées directement vers la Slovaquie, la Roumanie, la Serbie et l'Ukraine. Pour la Hongrie, la situation de la population nationale n'est pas satisfaisante. (de même pour celle des territoires même si pour le coup c'est moins officiel).
Pourquoi y-a-t'il eu la guerre en Croatie, en Bosnie et en Serbie quand la Slovénie a globalement été épargnée par les combats? L'extrême hétérogénéité des populations et ainsi l'impossibilité de concilier territoire et population était le carburant du conflit (et ça l'est encore en Bosnie).
Rien de nouveau ici. Mais je ne vois donc pas comment on pourrait ici faire l'impasse quant à prendre en compte la situation dans lequel se trouve l'Etat nationaliste par rapport à son territoire et à sa population.
Beobachter a écrit:(sur le franquisme, je serai plus nuancé, certes, le régime de Franco n'a pas cherché à s'étendre. Cela étant, il a quand même écrasé tout autre nationalisme en concurrence sur son territoire. Or l'adéquation population nationale-territoire est quand même un point majeur. L'Espagne n'avait pas à intervenir ailleurs car elle avait ce qu'elle voulait avoir dans son idéologie nationale (ce que n'avait ni l'Italie ni l'Allemagne ni la Hongrie).
De plus, le franquisme d'aujourd'hui ne cache nullement sa volonté de reprendre Gibraltar par exemple ainsi que d'interdire tout parti/mouvement autonomiste/indépendantiste.
Bref, je ne suis pas si sûr que les situations soient au fond si différentes)
Pour Gibraltar, no comment, les Espagnols ont totalement raison. Et pas que les franquistes, je ne comprends pas que tu écrives cela car c'est une idée bien plus rependue, surtout depuis le Brexit. Même s'il faudra alors que les Espagnols s'interrogent sur Ceuta et Melilla.
Quand tu penses que les Britanniques ont lâché Hong-Kong, mais pas Gibraltar, y a comme un malaise colonialiste, non ?
Pour en revenir à l'Espagne franquiste, une guerre civile, ce n'est pas une guerre entre États. Et Franco peut écraser tous les Catalans ou Basques d'Espagne, ça ne bousculera pas suffisamment ses voisins limitrophes pour en faire une guerre mondiale ou même européenne. Les Allemands et Français dans les années 30 se sont arrêtés très tôt dans leur ingérence officieuse sans que cela ne soit un facteur déclencheur de quoi que ce soit puisque les Français reconnaissent même Franco et basta.
Ensuite, pendant la 2ème Guerre mondiale, l'Espagne n'a absolument eu aucun rôle, restant neutre comme la Suisse, les deutschemarks dans les comptes en banque en moins. Y compris à travers ses colonies aux portes de l'Empire colonial français. Car elle aurait pu profiter de la faiblesse française pour s'installer un peu plus au Maroc par exemple.
Donc, je ne vois pas trop ton idée d'expansionnisme de l'intérieur qui conduirait à une situation conflictuelle dans les relations internationales. J'ai surtout l'impression que tu remets sur le tapi de façon détournée nos sujets de discussion lors du référendum illégal catalan.
Non, les Catalans et les Basques ne se battaient pas contre Franco pour leur indépendance, ce n'était pas la Yougoslavie des années 1990. Ils se battaient contre Franco, pour la République espagnole comme tant de volontaires français non basques, non catalans, etc...
Je n'ai pas vérifié mais je doute vraiment que dans leurs programmes politiques aucun des partis espagnols ne se soit permis de mettre qu'ils exigeaient de récupérer Gibraltar (que ce soit par ailleurs la position officielle de l'Etat espagnol ou que tel ou tel politicien lâche un petit mot ici et là, ce sont des choses bien moins fortes car de l'ordre du principe plus que d'une volonté réelle).
Sinon le choix de Gibraltar est celui de ses habitants d'abord et avant tout, le choix est le leur. Pas celui de Madrid (qui a par contre le droit de souhaiter son rattachement à l'Espagne, mais pas de l'exiger), et certainement pas le tien
Quant aux Catalans et Basques, tu as raison, ils ne se battaient pas pour eux-mêmes. Mais par contre Franco lui s'est bien battu contre toute velléité propre basque ou catalane (et pendant tout son temps au pouvoir). Tout simplement car c'était le dernier obstacle réel à la finalisation de l'objectif nationaliste espagnol.
Il est logique que Franco n'ait pas poursuivi ailleurs. Quel intérêt cela aurait-il eu dans le cadre d'un agenda nationaliste déjà atteint? (une situation qui diffère donc complètement des cas allemand, italien ou hongrois pour reprendre les cas évoqués) La conflictualité dépend tout simplement des situations...
Plus généralement, mon idée était de dire que les nationalismes européens actuels (hors Russie) sont des nationalismes de replis et non des nationalisme expansionnistes à l'origine de guerres entre États. En quoi les nationalismes/populismes au pouvoir en Italie, Autriche, Hongrie, Pologne ou République Tchèque sont-ils expansionnistes ? En quoi peuvent-ils initier une guerre de conquête territoriale comme on a connu en conclusion de la propagation du nationalisme des années 30 ?
Je ne dis pas qu'une guerre est impossible, car si je reviens sur la Russie, je pense que le vrai facteur déclencheur pourrait être là, mais je pense que les mécanismes ne sont pas les mêmes que dans les années 1930.
Par contre, on retrouve un ressort commun : l'ennemi de l’intérieur. Le Juif a été remplacé par l'étranger ou/et le musulman.
Surtout, le grand changement de notre époque actuelle par rapport aux années 1930 est la mondialisation et son ampleur dans tous les domaines. Ceci est réellement nouveau et ne peut être comparé à quoi que ce soit de significativement similaire. Et comme dans tout bouleversement important, la peur de l'avenir crée la peur tout court qui profite aux populistes.
Évaluer les risques réels actuels ne veut pas dire plaquer l'histoire sur le présent, ce que certains sont tentés de faire.
L'histoire s'écrit, elle ne se recopie pas.
Oui mais je pense que tu continues de ne pas voir ce qui justement diffère dans les situations même en présence.
Il y a tout simplement moins de nationalismes expansionnistes car il y a moins de raisons aujourd'hui qu'hier du fait d'une adéquation bien plus grande entre territoire et nation aujourd'hui qu'hier.
Tout ça n'est ainsi qu'une question de situation, ou si tu préfères d'opportunités.
Peu d'Etats gouvernés par des nationalistes ont de vraies raisons nationalistes d'être expansionnistes. Et pourtant! Ce qu'on voit c'est justement un quasi sans-faute expansionniste (certes modéré par les évolutions de notre monde mais quand même). Entre l'Autriche qui décide unilatéralement de donner des passeports à tous les Sud-Tyroliens qui le voudraient, la Hongrie qui a arrosé de passeports hongrois toutes les communautés hongroises des communautés voisines (jusqu'à leur faire prêter allégeance comme ça a été le cas en Ukraine), la Russie (pas besoin de développer), on a un 100% d'Etats nationalistes qui ont une situation propice à ça qui sont précisément dans une telle logique.
Si les moyens ont changé (pour l'instant), le fond est ici bel et bien le même.
Sur ta conclusion, oui bien sûr, il n'y a jamais de redite identique. Ce qui ne veut pas dire pour autant qu'il faut s'interdire de regarder derrière