L'Iran a bombardé le Kurdistan irakien aujourd'hui. Officiellement pour frapper les "organisations terroristes qui déstabilisent l'Iran depuis l'étranger". Concrètement, il s'agit plus de diversion qu'autre chose et d'agiter la menace de l'étranger et du séparatisme auprès de la population iranienne. Un pathétique essai de mobilisation du nationalisme iranien pour enrayer le mouvement actuel.
Une réaction très prévisible du régime iranien, profondément dégueulasse et injustifiée. Viser des populations civiles à l'étranger pour essayer de régler un problème interne, tout est dit sur le régime iranien.
Ils prennent quand même un risque en agissant de la sorte, c'est de renforcer encore la colère au sein du Kurdistan iranien... Avec leurs actions du jour, ils n'ont fait que prouver qu'aux yeux du régime la vie d'un Kurde n'avait pas de valeur, ce qui justifie la contestation actuelle par les Kurdes d'Iran.
Au-delà des actions de l'Iran, il convient quand même de dire un mot sur le Kurdistan irakien dont l'évolution est à pleurer. Le Kurdistan irakien aurait pu servir de modèle de ce qu'un Kurdistan autonome pouvait faire. A la place, il a sombré dans une kleptocratie paillasson. Kleptocratie car le pouvoir est entre les mains du PDK et du PUK, deux partis qui sont largement des dynasties familiales dont l'autorité est assise par un système quasi féodal et clientéliste à souhait. Les Barzani et les Talabani ont pour seul horizon leur petit pouvoir et leur enrichissement personnels. De souci pour le Kurdistan ou les Kurdes en général ils n'en ont pas.
C'est pour cela qu'aujourd'hui le Kurdistan irakien est un paillasson. La Turquie y est désormais chez elle, y agissant en toute impunité. Et il en va de même désormais pour l'Iran. Ces Etats peuvent librement bombarder et tuer des Kurdes d'Irak, les autorités kurdes irakiennes ne font même pas l'effort de protester ou de s'opposer aux Etats voisins (à l'inverse, elles répriment les manifs en soutien aux Kurdes d'Iran
) puisqu'il s'agit de surtout ne pas prendre de risques personnellement. Après avoir privé d'horizon économique, social et démocratique leurs populations, les autorités kurdes irakiennes ne font même plus l'effort de défendre celles-ci.
Et c'est sans même aborder la question de la considération accordée au reste des Kurdes. Les autorités kurdes irakiennes se foutant déjà pas mal des Kurdes d'Irak, il va de soi qu'ils se foutent encore plus des Kurdes de Turquie, d'Iran ou de Syrie. L'Iran et la Turquie ont déjà toute liberté d'action en Irak, alors forcément à l'extérieur de ce dernier, ils ont encore plus carte blanche (quand les autorités kurdes irakiennes ne virent pas carrément dans la collaboration la plus immonde).
Sur cette faillite du Kurdistan irakien la responsabilité occidentale est engagée car il n'y a pas eu de réponse suffisante à la dérive qui était pourtant visible du duo PDK-PUK. Confortés dans leur rôle de partenaires privilégiés (dû au fait qu'en Irak c'était le bordel et qu'ensuite est venue la menace terroriste qui a eu - assez logiquement - la priorité. Mais tout ça n'aurait pas dû obscurcir l'ensemble de la logique politique), ils ont su bercer de belles promesses que nous Occidentaux voulions entendre et tant pis si la réalité ne suivait pas. Désormais le mal est fait et tout le monde en paye le prix. C'est une terrible occasion manquée pour les Kurdes mais aussi pour l'ensemble de la région et pour nous