par azerd » 23 Fév 2019, 20:20
Interview de Bernardoni (gardien de Nimes) dans l'équipe sur sa passion pour le vélo
Le gardien nîmois voue une passion sans borne au vélo. Même si les entraînements le privent souvent du dénouement.
NÎMES – Paul Bernardoni, prêté à Nîmes par Bordeaux, reçoit chez lui, dans un petit village gardois qui sent bon le Tour de France. À l’ancienne, devant un café, le gardien, auteur d’une excellente saison avec le club gardois (10e de L 1), évoque justement son lien avec le cyclisme, qu’il avait déjà abordé sur le site le Gruppetto, en octobre. Jeudi, s’il n’avait pas eu entraînement dans la foulée, il aurait pu en parler des heures. Mais tout le ramène à son métier, son autre passion aussi, le football, puisqu’il habite à deux pas de la rue du Jeu-de-Ballon.
« Avez-vous jeté un œil sur le calendrier des courses ?
Oui et je me suis même abonné à Vélo Magazine, qui appartient en plus à L’Équipe (rires).Je vais pouvoir mieux suivre les courses. Cela fait vraiment trois ou quatre ans que je suis dedans. Je regarde toutes les étapes du Tour, Paris - Roubaix est inclus dans le programme de l’année, c’est obligatoire. J’essaie de suivre un maximum mais, malheureusement, l’heure d’arrivée des étapes correspond au moment où je pars m’entraîner. Je vois tout sauf l’arrivée (rires).
Connaissez-vous le parcours du prochain Tour de France (6 - 28 juillet) ?
Oui et il passe à Nîmes (le 23 juillet pour la 16 e étape). Je ne sais pas si je serai encore là(il est prêté par Bordeaux pour la saison) ! Selon mon emploi du temps, je vais essayer de me faire une étape. Cet été, honnêtement, je vois un gros Tour des Français. On a vraiment de super coureurs avec (Romain) Bardet,(Thibaut) Pinot,(Warren)Barguil,(Lilian) Calmejane… J’aimerais revivre un Tour comme en 2011 avec (Thomas) Voeckler (4 e du classement général), avec un mec qui fout le bordel ! Ou quand (Christophe) Riblon gagne l’Alpe-d’Huez (en 2013).
Riblon est à l’agonie, il craque, revient au mental sur Tejay Van Garderen devant lui et j’entends encore Jalabert (Cédric Vasseur en réalité) dire:“Il faut y aller ! Il faut y aller !” Et bam ! Il envoie et tout le public suit. C’est ce que j’aime sur le Tour, tu cries, tu gueules, tu applaudis, c’est un spectacle.
Comme beaucoup, votre passion pour le vélo est née, enfant, avec le Tour de France mais vous l’avez étendue, ensuite, à toute la discipline.
On aimait le Tour à la maison mais mes parents n’étaient pas plus fans que ça. La première fois que je suis allé sur une étape, c’était à Châteauroux avec le meilleur ami de mon père qui m’avait fait la surprise. On s’était positionnés à cinq kilomètres de l’arrivée et les coureurs sont passés à une telle vitesse et... c’était fini. La veille, j’étais allé à l’hôtel pour demander des autographes à (Alexandre) Vinokourov, notamment. J’ai honte de le dire aujourd’hui mais j’adorais aussi Michael Rasmussen (*). Au fur et à mesure, j’ai été pris dans le truc. Au centre de formation où on ne parle que foot, foot et foot, il me fallait autre chose. J’achetais Pro Cycling Manager (un jeu vidéo de cyclisme) et je m’éclatais avec ça, comme aujourd’hui j’adore regarder des documentaires pour voir la façon dont les coureurs se préparent, s’arrachent.
“Comme tout le monde, j’adore les leaders mais les équipiers, ce sont les meilleurs
Avez-vous pratiqué le vélo ?
Non, je suis nul. J’ai un vélo, je le sors pendant les vacances. J’en fais pour ma préparation personnelle, j’essaie de partir deux heures, j’aime bien découvrir les routes, sans but, et si je me perds, je me perds. J’ai remarqué, après les étapes, que les coureurs remontent sur unvélo(sur des home trainer) et moulinent. Du coup, par mimétisme, s’il y a un vélo après un match, je monte dessus et je roule pendant quinze minutes. Peut-être que cela ne sert à rien mais cela ne me fait pas de mal.
Vous évoquez la faculté des coureurs à se mettre dans le rouge. Avez-vous déjà ressenti cette sensation ?
Oui, un jour où je montais un col en Savoie, vers La Thuile, un deuxième catégorie que les cyclistes passent comme si de rien n’était. Je n’en pouvais plus, mes jambes brûlaient et cela m’a rappelé le spécifique gardien quand on plonge, qu’on se relève, plusieurs fois de suite. La respiration est coupée mais on ne lâche pas. Sur le coup, tu ne prends aucun plaisir mais quand tu arrives en haut, c’est un kiff total.
Quel type de cycliste professionnel auriez-vous pu être ?
Comme tout le monde, j’adore les leaders mais les équipiers, ce sont les meilleurs. Des Cyril Gautier, Damien Gaudin, des mecs dont on ne parle jamais. Cravacher toute l’année pour te sacrifier comme un minable à trente bornes de la ligne… Et quand les gars arrivent trente minutes après en levant les bras parce que leur leader a gagné, je trouve ça juste énorme. Chez Europcar, je me souviens de Yukiya Arashiro qui se sacrifie pour Voeckler dans une échappée. À l’arrivée, Jean-René Bernaudeau (le manager) et Voeckler le cherchaient partout : “Ilest où Yukiya, il est où ?” Parce qu’ils savaient que c’était lui qui les avait fait gagner.
Quelle course auriez-vous aimé disputer ?
Parix - Roubaix ! Être comme Silvan Dillier (2 e l’an dernier), échappé depuis longtemps, et fumer Peter Sagan ! Malheureusement, cela n’aurait pas été possible(rires). J’adore Sagan mais, l’an passé, en filou, il faisait aller Dillier dans les trous. J’étais en voiture, j’avais mis mon téléphone en kit main libre, j’avais juste le son et je n’arrêtais pas de me dire : “Je rate ça !” Bon, je regardais un peu (sourires).
Estimez-vous pratiquer un sport “plus facile” ?
Oui, je pense, même si je m’entraîne aussi toute la semaine. On les voit rouler pendant des heures alors que nous, dans le foot, on râle quand on double (les séances d’entraînement), c’est assez marrant. En tant que sportif de haut niveau, je peux aussi comprendre ce qu’ils vivent. Les gens vont se plaindre parce que Bardet ou Pinot ont une défaillance, moi, je sais que cela peut arriver d’être moins bien physiquement.
On a l’impression qu’ils vous fascinent…
J’étais mal pour Thibaut Pinot dans le Giro lorsqu’il termine l’étape en souffrant d’une pneumopathie (3 e du général, il doit abandonner la veille de l’arrivée) ou Philippe Gilbert, après sa chute dans le Tour l’an passé, qui finit l’étape avec une rotule fracturée… On était en stage de préparation avec Nîmes et, devant la télévision, je me suis dit : “Gilbert prend trop de risques. ” Quand je le vois tomber (dans la descente du col du Portet-d’Aspet), je pense qu’il est mort. Et le gars se relève, fait un signe en levant le pouce et repart. Moi qui ai peur des descentes, je me dis que les gars sont complètement barjots.
Aujourd’hui, votre étape de montagne vous mène à Paris… Si vous gagnez, vous rentrez à vélo ?
Oui, on va jouer contre les Sky (rires).Onva y aller pour tout donner, tenter quelque chose, sans regret comme à l’aller (défaite 2-4,le1 er septembre). Rentrer à vélo, cela fait un peu loin quand même. Mais cet été, si on est champions d’Europe avec les Espoirs, pourquoi pas faire une étape ? Avec Anthony Briançon (son coéquipier), on envisage de faire le Ventoux. » É
(*) Lors du Tour de France 2007, alors qu’il porte le Maillot Jaune, il est exclu de l’épreuve par son équipe, Rabobank, pour s’être soustrait à des contrôles antidopage. En janvier 2013, il avoue s’être dopé entre 1998 et 2010.
EN BREF
21 ANS 1,90 m ; 78 kg. Gardien de but. Club : Nîmes.
⬛ 2015 : le 8 août, il découvre la Ligue 1 et signe son premier clean sheet avec Troyes lors de la réception du GFC Ajaccio (0-0).
1,4
SA MOYENNE DE BUTS ENCAISSÉS PAR MATCH CETTE SAISON, la plus basse de sa carrière en Ligue 1.
En 2015-2016, elle était de 2,1 (44 buts encaissés en 21 matches) dans une saison commencée à Troyes (26 buts en 14 rencontres) et terminée à Bordeaux (18 buts en 7 matches).