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En cette fin d’année 2019, LeGruppetto vous propose un nouveau classement pour connaître le meilleur coureur des années 2010, à l’aide de notre propre barème. L’accent a été mis sur les victoires pour classer les coureurs sur les plus grandes courses, avec un système dégressif où une deuxième place apporte 50% des points de la première place. Seuls plusieurs grands succès peuvent permettre aux coureurs de figurer en haut de ce top 30. En voici la deuxième partie jusqu’à la 11e place.

20e : Tom Dumoulin, 34 pts

Encore dans la catégorie Espoirs à l’entame de la décennie, il peut être pertinent de rappeler que sa victoire dans le Grand Prix du Portugal (alors épreuve de la Coupe des Nations Espoirs) a été obtenue sur un vélo qui n’était pas le sien. Il passe professionnel en 2012 et ses résultats dans le contre-la-montre confirment ce qu’on attendait de lui. Il est même 2e de l’Eneco Tour l’année suivante, avant que les premiers succès et qu’un premier titre national de la spécialité arrivent, accompagnées de premières places d’honneur en haute montagne. Gagnant de plus en plus sur le circuit World Tour, il était même à deux doigts de décrocher la Vuelta 2015, ne s’effondrant qu’à la veille de Madrid dans le Puerto de la Morcuera au cours d’une étape très animée. Mais Dumoulin reste encore avant tout un rouleur. Vice-champion Olympique 2016, il remporte en 2017 le Giro grâce à sa capacité à savoir rouler très fort en solitaire, monter les cols à un rythme régulier, mais aussi de faire abstraction de problèmes gastriques. Son année 2018 est marquée par une incroyable régularité et des victoires d’étapes sur les Grands Tours. Il ne fait pourtant que tourner autour : 2e du Giro, 2e du Tour et 2e des mondiaux contre-la-montre, perdant son maillot arc-en-ciel et ne concrétisant pas son incroyable saison. Mal remis d’une chute lors du Giro 2019, il déclare ensuite forfait pour le Tour et la Vuelta et il entamera la décennie à venir avec un sentiment de revanche sur cette année blanche. Après avoir passé toute sa carrière professionnelle jusqu’ici dans l’actuelle structure Sunweb, Tom Dumoulin évoluera la saison prochaine avec la Jumbo-Visma.

19e : Michael Matthews, 34 pts

À moins de 20 ans, il termine la décennie précédente en devenant champion d’Océanie sur route, montant un cran au-dessus en 2010 avec le titre mondial chez les Espoirs, pour passer professionnel dès le début de l’année 2011. Ses premiers succès ne tardent pas, sur la Jayco Bay Classic puis le Tour Down Under. En 2013, l’Australien passe à la vitesse supérieure et décroche sa première victoire d’étape sur un Grand Tour lors de la Vuelta. Il gagnera aussi sur le Giro et sur le Tour, remportant au moins une étape de Grand Tour sur 5 années consécutives. Cette série durera jusqu’en 2017, avec comme bouquet final le gain du maillot vert sur les routes du Tour de France. La même année, il est sacré aux championnats du monde dans le contre-la-montre par équipes avec sa formation Sunweb. Pendant ce temps, il obtient de bons résultats sur les courses d’un jour avec des podiums au Québec, sur l’Amstel Gold Race ou à Milan – San Remo. Il est également surprenant 4e d’un Liège-Bastogne-Liège soporifique. Il faut attendre 2018 pour qu’une semi-classique lui revienne, avec même un doublé dans les deux courses Canadiennes grâce à des sprints de costauds à Québec puis à Montréal. Cette année, il a à nouveau remporté un succès à Québec pour masquer un peu une saison plus compliquée. Sans grande victoire à côté, il a continué à obtenir des places d’honneur de plus en plus variées, preuve en est avec ses tops 10 sur le Tour des Flandres et en haut du Mur de Huy.

18e : Richie Porte, 35 pts

Triathlète chez les jeunes, Porte obtient quelques bons résultats sur des courses espoirs en Europe ainsi que sur les courses mineures d’Australie. Il s’immisce même dans le top 10 du classement final du Tour Down Under grâce à une place dans la sélection Australienne. L’entrée dans la nouvelle décennie verra sa grande révélation en fin de printemps. Vainqueur du contre-la-montre du Tour de Romandie, il s’empare du maillot rose sur le Giro à l’issue de l’incroyable étape de L’Aquila, pour finalement se classer 7e avec un maillot blanc de meilleur jeune à la clé. Ce fait d’arme lance sa carrière de spécialiste des courses par étapes. Grâce notamment à l’exercice chronométré, il continue de gagner chaque année. Sa première victoire dans un classement général arrive en Algarve en 2012, puis il monte d’un cran en remportant Paris-Nice en 2013 grâce au contre-la-montre du Col d’Èze, ce qu’il refera en 2015. Entre temps, il commence sa série de victoires au Willunga Hill, pourtant seulement ponctuée d’un seul succès au général du Tour Down Under, en 2017. Porte complète progressivement son CV avec quelques belles lignes comme un Tour de Catalogne, un Tour du Trentin et un Tour de Romandie. Un Tour de Suisse arrivera également en 2018. Plus discret dans les grands tours, étant notamment le principal équipier de Chris Froome sur le Tour, son arrivée chez BMC en 2016 lui permet de prendre une 5e place en juillet, son seul top 10 sur 3 semaines depuis le Giro 2010. Aucun autre n’arrivera, la faute notamment à des abandons sur chute lors de la 9e étape de la Grande Boucle deux années de suite.

17e : Rui Costa, 36 pts

Rui Costa aborde la décennie avec une bonne première année chez Caisse d’Épargne, ayant notamment remporté les 4 Jours de Dunkerque. La décennie suivante se lance sur la même dynamique, avec un succès dès le Challenge de Majorque et une étape du Tour de Suisse. La suite est plus compliquée, notamment en raison d’un contrôle positif lors du championnat du Portugal révélé tardivement dans la saison, une bagarre avec Carlos Barredo sur le Tour de France et des disputes avec ses directeurs sportifs. Sans contrat début 2011, il rejoint néanmoins la Movistar (continuité de son équipe précédente au printemps suivant). Comme si de rien n’était, il revient sur les routes du Tour et remporte l’étape de Super Besse. À l’automne, il gagne le GP de Montréal. Puis l’année suivante, il lance sa série de 3 victoires sur le Tour de Suisse. Deux étapes sur le Tour de France suivront, tout comme un titre de champion du monde en 2013 acquis à Florence. Par la suite, son opportunisme sera moins récompensé. Sur la deuxième moitié de la décennie, il multiplie les places d’honneur sur les classiques et sur les courses d’une semaine, mais il gagne bien moins souvent. Il n’a plus connu le succès depuis le Tour d’Abu Dhabi en février 2017.

16e : Marcel Kittel, 38 pts

Début 2010, l’Allemand passe professionnel avec d’excellents résultats de rouleur : double champion du monde du contre-la-montre chez les juniors, puis champion d’Europe de la spécialité chez les espoirs, il devient rapidement un grand sprinteur du peloton pro, avec un premier succès dès le Langkawi, puis la victoire dans 4 des 5 étapes des 4 Jours de Dunkerque en 2011. Les victoires sur le circuit World Tour n’attendent pas, avec 4 étapes en Pologne et même déjà un succès sur la Vuelta. Il ne reviendra plus en Espagne mais va cumuler 14 étapes sur le Tour de France, dont les premières en 2013 et 2014 lui permettent de porter le maillot jaune en Corse et dans le Yorkshire. Les mêmes années, il lève les bras sur les Champs Élysées. Il remporte également 4 étapes du Giro mais aucune sur le sol Italien, ces victoires étant acquises en Irlande et aux Pays-Bas. À côté de cela, de nombreuses courses sont remportées au sprint même s’il brille moins dans les courses d’un jour. Faisons exception du Scheldeprijs, qu’il remporte à 5 occasions et qui sera, comme un symbole, la dernière course de sa carrière. Son compteur de victoires approche la centaine lorsqu’il remporte le Trofeo Palma à Majorque début 2019, mais une grande perte de motivation l’amène à quitter sa formation Katusha en mai, avant d’annoncer sa retraite en août, à seulement 31 ans.

15e : Daniel Martin, 39 pts

L’Irlandais commence la décennie avec déjà à son palmarès deux titres nationaux, une Route du Sud et une 2ème place dans le Tour de Catalogne, seulement battu par Alejandro Valverde. La première victoire majeure de sa carrière arrive dès 2010 lors du Tour de Pologne, qui reste la première de ses victoires sur une course World Tour. Durant le reste de la décennie, seules 3 victoires suivront pour une vingtaine de podiums. Autrement dit : souvent placé, rarement gagnant. À un Tour de Catalogne s’ajoutent cependant deux monuments : quitte à gagner peu, autant gagner haut. En 2013, il domine Joaquim Rodriguez dans le final de Liège-Bastogne-Liège jugé au sommet de la côte d’Ans, dans un face à face arbitré par un spectateur déguisé en panda. L’année suivante, une chute sur ce dernier virage à gauche lui sera fatale alors qu’un doublé semblait probable. Cette même année, il se venge sur un Tour de Lombardie faisant son retour à Bergame après une décennie d’absence. Il anticipe le sprint à 9 pour pouvoir lever les bras. Sur les Grands Tours, il n’a pas fait mieux qu’une 7e place de la Vuelta et une 6e du Tour de France, avec une victoire d’étape en Espagne et deux en France, sur des terrains variés montrant bien sa polyvalence : en altitude dans la station de la Covatilla, dans la vallée au terme d’une étape enchaînant 5 cols à Bagnères-de-Bigorre et enfin en puncheur en haut de la côte de Mûr-de-Bretagne. Un « mur » lui souriant plus que celui de Huy, où il obtient 3 podiums sur la Flèche Wallonne et même une 4ème place durant une étape du Tour de France, sans jamais parvenir à s’imposer.

14e : Tony Martin, 43 pts

Avec de beaux résultats dans le contre-la-montre (victoires au Tour d’Allemagne et au Tour de Suisse), l’Allemand entame les années 2010 avec un potentiel pour la montagne. Si les places d’honneur dans les courses d’une semaine se poursuivent par Paris-Nice, le Tour de Pékin, l’Eneco Tour, ou encore le Tour de Belgique, c’est dans le contre-la-montre que Tony Martin persévérera. Incroyable machine à rouler, 5 de ses 7 étapes dans les Grands Tours sont obtenues dans l’exercice solitaire et les deux autres viennent conclure de belles échappées sur le Tour de France, en moyenne montagne et sur les pavés, avec dans ce dernier cas un maillot jaune à la clé. Il ne le perdra qu’en raison d’une fracture de la clavicule, devenant le premier leader du Tour à quitter la course sur blessure depuis 17 ans et un autre grand rouleur : Chris Boardman. Par ailleurs, s’il n’obtient qu’une médaille d’argent dans le contre-la-montre aux Jeux Olympiques, il brille dans les championnats. Et il n’est pas ici uniquement question du championnat d’Allemagne où il est sur le podium tous les ans depuis 2008 et vainqueur tous les ans depuis 2012 (après un premier titre en 2010). Il est en effet 7 fois médaillé mondial, dont 4 fois champion du monde, deux records qu’il partage avec Fabian Cancellara. Mais contrairement à ce dernier, il a su conserver son maillot arc-en-ciel pendant 3 ans, ce qui n’avait été fait auparavant que par Michael Rogers (rétroactivement). En perte de vitesse sur la fin de la décennie, il n’en reste pas moins un rouleur exceptionnel qui sait maîtriser le rythme du peloton dans la plaine comme peu de coureurs. Il l’a encore montré sur le Tour de France 2019 au service de ses leaders de la Jumbo-Visma.

13e : André Greipel, 44 pts

Un Allemand en suit un autre, mais le « gorille de Rostock » est bien plus âgé que le « panzerwagen », puisqu’il est professionnel depuis 2005. Barré par la concurrence de Mark Cavendish, il tarde à obtenir le grand palmarès qu’il mérite, même s’il a remporté le premier Tour Down Under du « ProTour », sa première étape sur le Giro, puis 4 étapes de la Vuelta avec le maillot vert à la clé en fin de décennie 2000. Encore gêné par le Britannique une année, il remporte cependant une nouvelle étape du Giro, un nouveau Tour Down Under et de nombreuses victoires sur des courses secondaires. Il rejoint la Lotto en 2011 et la situation générale tend à changer. Déjà, il participe au Tour de France et s’y impose. Il reviendra ensuite chaque année sur la Grande Boucle, pour cumuler 11 victoires d’étapes dont deux fois celle des Champs Élysées, réalisant même un quadruplé en 2015. Sur le Giro, il cumule en tout 7 étapes et porte même le maillot rose en Sardaigne en 2017 grâce aux bonifications. Sur les grandes courses d’un jour, il n’a cependant qu’une seule victoire (en plus de très nombreux succès dans les semi-classiques) avec la Cyclassics de Hambourg en 2015, à domicile. Contrairement à son compatriote Marcel Kittel lâché ce jour-là dans la dernière montée du Waseberg, André Greipel n’a pas de souci pour passer les côtes, se permettant même d’attaquer dans le Koppenberg sur les routes du Tour des Flandres. La décennie s’achève de façon moins brillante, avec une année ratée chez Arkéa-Samsic comptant pour seule victoire une étape de la Tropicale Amissa Bongo. En 2020, il portera le maillot de la formation Israël Start-Up Nation pour une 16ème saison dans les pelotons, à 37 ans.

12e : Alberto Contador, 47 pts

Double vainqueur du Tour de France et auteur d’un doublé Giro-Vuelta (sans compter les victoires dans Paris-Nice et le Tour du Pays Basque), Alberto Contador entame la décennie 2010 comme l’un des meilleurs coureurs de Grands Tours. Peu importe son niveau à la pédale, il gardera ce rôle jusqu’à sa retraite. Cependant, la décennie ne commence pas de façon optimale. Les lenteurs judiciaires concernant un contrôle positif lui font perdre en février 2012 son troisième Tour de France et son deuxième Giro. Suspendu rétroactivement pendant 2 ans, il ne manque en fait la compétition qu’au printemps et au début de l’été 2012, pour revenir de cette pause forcée par un sacre sur la Vuelta. Ce retour aux affaires est marqué du sceau de l’étape culte de Fuente Dé où il s’empare de son tout premier maillot rouge (il était or 4 ans plus tôt). Une autre Vuelta arrivera en 2014, revanche d’un abandon sur blessure dans les Vosges lors de la Grande Boucle. Il gagne également un autre Giro, en 2015, en portant le maillot rose pendant la quasi-intégralité de la course. En revanche, il ne brillera plus jamais en juillet comme il l’avait fait auparavant. Au pied du podium en 2013, plus discret 5ème en 2015, il abandonne dès le premier col des Pyrénées Espagnols en 2016, après une tentative d’échappée comme chant du cygne. L’hypothèse d’une retraite sera décalée d’un an et il reviendra pour animer la haute montagne du Tour et de la Vuelta une dernière année de plus, sans pour autant avoir les capacités pour jouer la victoire finale. Il reste à ce jour le seul coureur vainqueur au moins 2 fois de chaque Grand Tour avec Bernard Hinault. On risque d’attendre un bon moment avant de voir quelqu’un les rejoindre.

11e : Alexander Kristoff, 49 pts

Professionnel depuis ses 18 ans dans des équipes continentales Norvégiennes, sa carrière s’emballe à l’entame des années 2010 lorsqu’il rejoint la BMC. Pour sa première expérience dans une équipe du plus haut niveau, il y obtient un dernier titre de champion de Norvège pour meilleur succès. Il franchit une nouvelle étape dans sa carrière l’année suivante en rejoignant Katusha. Le Norvégien se fait remarquer sous le maillot de son pays, en prenant la médaille de bronze lors des Jeux Olympiques de Londres en 2012, où il règle le sprint du peloton derrière Alexandre Vinokourov et Rigoberto Uran. L’année suivante, un peu plus présent sur les plus grandes courses, il lève les bras sur le circuit World Tour (une étape du Tour de Suisse) et monte sur le podium de la Cyclassics, en plus de tops 10 sur Milan – San Remo, le Tour des Flandres et Paris-Roubaix. Son ascension se poursuit en 2014 : il gagne la classicissima, puis deux fois sur les routes du Tour de France, avant de gagner la classique des sprinteurs à Hambourg. Désormais un des meilleurs coureurs du peloton, il confirme ce statut en 2015 avec un nouveau monument, le Tour des Flandres, de nombreuses victoires au sprint tout au long de l’année, une autre classique World Tour, cette fois à Plouay, et toujours de nombreuses places d’honneurs. S’il n’a depuis plus connu de saison aussi aboutie, il signe cependant de nombreux succès de prestige jusqu’au bout de la décennie, notamment un titre de champion d’Europe, des victoires à Francfort et à Londres, une victoire dans Gent-Wevelgem et même l’étape des Champs Élysées sur le Tour de France. En parallèle, les places d’honneur s’accumulent sur les grandes classiques. Sa régularité est telle qu’il est le seul coureur à avoir un top 5 sur au moins un monument chaque année depuis 2013. Une série qu’il semble en mesure de pouvoir continuer.

Par Geoffrey L.

Crédit Photos: Clémence Ducrot et Flore Buquet
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