En cette période de reprise de la saison en Europe, et plus particulièrement en Belgique, un certain barème sera appliqué pour faire ressortir les meilleurs flandriens. Seront combinés les résultats des courses depuis que la compétition cycliste existe, c’est-à-dire la fin du XIXème siècle. Le barème choisi ici a été relativement simple, afin de ne pas compliquer la tâche du rassemblement des épreuves, et s’est voulu objectif, avec pour seuls choix arbitraires de quantifier le niveau des courses selon leur statut à différentes époques. Il y aura donc beaucoup de coureurs inconnus du grand public dans les premiers cités ; ce sera l’occasion de visiter (ou de revisiter) l’histoire du cyclisme.
Paris-Roubaix et le Tour des Flandres voient leur top 10 marquer 8-6-4-3-2-1-1-1-1-1 points. Derrière, cela a été réparti en 4 catégories, avec 5-3-2-1-1 pour les 5 premiers de la première, 3-2-1 pour le podium de la seconde, puis 2 et 1 points aux vainqueurs des deux catégories restantes. La catégorie principale a été prise pour Gent-Wevelgem, le circuit du Het Volk/Het Nieuwsblad, Paris-Bruxelles (jusqu’à sa première annulation en 1966) et pour Harelbeke (depuis sa promotion World Tour en 2012). Pour les autres sans rentrer dans le détail sont inclus des courses plus anciennes, certaines ayant disparues il y a bien longtemps, afin d’essayer de trouver une forme d’équité entre les époques.
10ème : Peter Van Petegem, 77 points
Grand rival de Johan Museeuw pendant toute une décennie, le « Noir de Brakel » a toujours souffert de la comparaison avec son rival, soutenu par l’armada Mapei. Courant pour une équipe Néerlandaise pendant plusieurs années, ou allant chercher un contrat juteux pour une équipe Américaine qui a explosé en plein vol, tout ceci a participé à amener son adversaire comme le grand favori des plus purs flandriens, lorsque la Belgique se passionnait pour Frank Vandenbroucke. Même sa première victoire dans le Ronde, en 1999, malgré une impressionnante domination dans le Muur, était réduite à celle d’une course « faussée » par une chute de VDB, bloquant Tchmil et tous les autres favoris. Quatre ans plus tard, alors qu’il est revenu chez Lotto, il se montre le plus fort un mont plus tôt, dans le Tenbosse, à franchir pour sortir de sa ville de Brakel. Résistant sans problèmes aux quelques attaques d’un adversaire de l’équipe Quick-Step dans le Muur et le Bosberg, puis l’écrasant au sprint, il a alors tout pour être véritablement célébré comme le champion flandrien qu’il est (après avoir déjà quasiment tout gagné dans les Flandres). Sauf que les fans scandent le nom de cet adversaire, sur qui les médias concentrent l’attention, soit pour évoquer son grand retour au plus haut niveau, soit pour supposer qu’il a voulu se faire payer pour relayer et/ou pour ne pas disputer le sprint. Une semaine plus tard, Frank Vandenbroucke ne sera plus en état de perturber le leader de la Lotto, dont la victoire dans le Ronde ne fait pas de lui le favori pour Roubaix, le doublé n’ayant plus été réalisé depuis un quart de siècle. Seul Eddy Merckx l’annonce comme grand favori, ce qu’on impute au sponsoring du cannibale pour la formation Lotto, qu’il équipe alors en cycles. Mais Peter Van Petegem va bien aller chercher ce doublé rare, dont le dernier auteur était Roger De Vlaeminck. C’est dans le Carrefour de l’Arbre qu’il impressionne, y reprenant Dario Pieri et Viatcheslav Ekimov, qu’il battra aisément au sprint, pour être le seul coureur à avoir levé les bras sur le vélodrome Roubaisien avec le maillot de leader de la Coupe du Monde sur le dos.
9ème : Walter Godefroot, 84 points
Le Belge a tout gagné dans les Flandres : le Ronde, Gent-Wevelgem, À Travers la Belgique, le Scheldeprijs. On peut ajouter à cela Liège-Bastogne-Liège, le championnat de Zurich, Bordeaux-Paris et bien-sûr Paris-Roubaix, ainsi que des étapes dans les trois Grands Tours. Seule la haute montagne manque à ce palmarès très varié. Si varié que ses victoires dans le Tour des Flandres sont même bien différentes l’une de l’autre, comme s’il s’agissait de deux courses différentes. La première est acquise au sprint, entre 16 coureurs, dans une course ne comptant que très peu de monts et dont la montée de Grammont restait dans sa partie la plus urbaine, sans aller jusqu’à la chappelle. Il y avait encore ensuite une longue partie plane, sur des routes larges, vers la banlieue de Gent. La seconde, obtenue une décennie plus tard (un record), est dans une course dont l’arrivée est déplacée depuis peu à Meerbeke, dans un final enchaînant Kapelmuur et Bosberg, après avoir été chercher volontairement le « Vieux » Kwaremont, mais aussi le Taaienberg, l’Eikenberg, le Volkegemberg et le Boigneberg, pour un Ronde se rapprochant un peu plus de ses versions modernes, en allant chercher des petites routes de campagnes dans les Ardennes Flamandes, en plus des quelques monts encore pavés. Une autre difficulté était au programme cette année-là : le Koppenberg. À l’image de la tranchée d’Arenberg pour Paris-Roubaix, dont l’ajout est dû à Jean Stablinki, ayant informé les organisateurs de son existence, alors qu’ils étaient à la recherche de pavés, le Koppenberg a été ajouté à la course après qu’un coureur local ait renseigné les organisateurs du Ronde sur sa présence, sa terrible pente et ses pavés infernaux (encore plus à l’époque qu’aujourd’hui). Et ce coureur n’est autre que Walter Godefroot.
8ème : Fabian Cancellara, 91 points
Avec 3 victoires dans le Tour des Flandres et autant dans Paris-Roubaix, on aurait pu imaginer le Suisse bien mieux classé. D’autant plus que 3 autres succès viennent s’ajouter à Harelbeke. Sauf qu’hormis ces 9 victoires, Fabian Cancellara n’a jamais gagné dans une classique du Nord. Son palmarès dans les courses d’un jour étant plus fourni en Italie, avec 3 fois (encore) les Strade Bianche, mais aussi un Milan-Sanremo. En Belgique, on trouve d’autres succès, mais il s’agit de victoires obtenues dans le contre-la-montre, comme des étapes du Tour de Belgique ou l’ancien GP Eddy Merckx. Dans le contre-la-montre, il a obtenu bien plus victoires, avec 4 titres mondiaux, 2 olympiques, ainsi que de nombreuses étapes lui permettant d’avoir remporté Tirreno-Adriatico, le Tour de Suisse et d’avoir porté à 29 reprises le maillot jaune sur les routes du Tour de France, ce qui est un record pour un coureur n’ayant jamais remporté le Tour, le tout en cumulant ces jours en jaune sur 6 éditions différentes de la Grande Boucle, ce que seuls 3 autres coureurs ont fait : André Darrigade, Eddy Merckx et Bernard Hinault. Par ailleurs, le Tour de France 2007 lui a permis de mettre en avant son panache, ses capacités de rouleurs et celles à être le plus puissant sur les pavés, le tout en jaune. Lors de l’arrivée à Compiègne, il se replace à l’avant dans une rue pavée s’achevant sous la flamme rouge, puis il attaque à 800 mètres de la ligne, reprenant le 4 coureurs échappés, dont 2 depuis 200 kilomètres, dans une étape courue au ralenti, pour résister de justesse au retour des sprinteurs. Il reste aujourd’hui le dernier porteur du maillot jaune à avoir gagné une étape de plaine du Tour de France. Ses prédécesseurs étant Bernard Hinault et Eddy Merckx.
7ème : Jan Raas, 93 points
Peut-être le meilleur coureur Néerlandais de tous les temps, il a beaucoup brillé dans son pays, remportant 5 fois l’Amstel Gold Race, devenant champion du monde dans un circuit tracé autour du Cauberg et porteur du maillot jaune lors d’un Grand Départ aux Pays-Bas sur le Tour de France 1978. Il a aussi remporté de nombreuses classiques, avec Milan-Sanremo et deux fois le Grand Prix d’Automne (nom donné alors à Paris-Tours, dont les villes de départ et d’arrivée changeaient régulièrement), mais aussi et surtout de très nombreuses courses dans les Flandres, faisant de lui le non-Belge le plus haut dans ce classement. Les 3 classiques majeures de ce type sont à son palmarès, en plus de beaucoup de podium. Sa régularité dans les grandes classiques fait qu’il en a remporté au moins une chaque année de 1977 à 1983. Parmi elles, on y trouve son Paris-Roubaix 1982 et ses Tours des Flandres 1979 et 1983, tous les trois remportés en solitaire, au contraire de sa victoire en 1981 à Wevelgem, obtenue au sprint devant 6 coureurs. Sur les routes du Nord, son palmarès dans les semi-classiques, avec des succès dans Paris-Bruxelles, le Het Volk, Kuurne-Bruxelles-Kuurne, À travers la Belgique, ainsi que 3 victoires consécutives à Harelbeke, dans le GP E3.
6ème : Albéric « Briek » Schotte, 96 points
Surnommé dans ses premières années « le bossu de Kanegem », Albéric Schotte allait vite devenir « Ijzeren Briek ». Ijzeren peut se traduire par « l’homme de fer » et Briek est une simple contraction de son prénom. On peut lire ceci dans le rue du Tour des Flandres, sur les hauteurs de Kwaremont, sur une route peinte aux noms des vainqueurs du Ronde, dans lequel il a triomphé en 1942 (la course étant organisée malgré l’occupation) et en 1948, et ornée de quelques illustrations pour ses vainqueurs les plus émérites. Briek Schotte en est vraiment un, au point d’être même surnommé comme « le dernier des Flandriens », un mot initialement lié aux immigrés flamands venant travailler dans les champs en France au lendemain de la Première Guerre Mondiale, réputés comme des travailleurs très endurants, quelques soient les conditions météorologiques, aussi extrêmes soit-elles. Le nom s’est ensuite naturellement transposé au cyclisme, notamment au Ronde de l’époque, faisant une grande boucle de l’ancien Comté de Flandre, dont la majorité du tracé se faisait sur du gros pavé et des graviers, avec notamment une interminable ligne droite sur la côte, de Knokke à Oostende, où le vent était presque toujours défavorable. Ce Tour des Flandres, Briek Schotte l’a découvert en 1940. Issu d’une famille paysanne très pauvre, il voulait y obtenir quelques prix en natures dans certaines villes et certaines côtes, dont une machine à laver pour sa mère. Il fera mieux que cela, terminant à la troisième place, alors qu’il n’a que 20 ans. Il aimait tellement sa Flandre natale qu’il y passa toute sa carrière professionnelle. Courant un peu dans les Ardennes, mais quasiment jamais à l’étranger, sauf pour quelques rares grandes classiques et pour le Tour de France, dont il a pris la deuxième place en 1948. La même année, il est sacré champion du monde à Valkenburg, dans une épreuve au circuit très court et dans une journée où le Cauberg, pavé à l’époque, a du être monté à 27 occasions. Ceci avec le Ronde remporté lui fait remporter le tout premier Challenge Desgrange-Colombo, sorte de version primitive de l’actuel World Tour, regroupant les 3 plus grandes courses Belges, les 3 plus grandes courses Françaises et les 3 plus grandes courses Italiennes du calendrier. Mais parmi celles-ci, c’est bien le Tour des Flandres qu’il chérissait le plus, y prenant le départ à 20 reprises, de 1940 à 1959 (un record), pour 8 podiums (un record), dont les 2 victoires évoquées en début de paragraphe. Il y a 13 ans, il a trouvé un dernier moyen de lier son nom au Ronde, nous quittant le jour de la course.
5ème : Eddy Merckx, 123 points
On lui compte 525 victoires sur route, dont des victoires dans 5 Tours de France, 5 Giri, une Vuelta, 3 titres de champion du monde (voire même 4 avec celui obtenu chez les amateurs), 7 Milan-Sanremo, 5 Liège-Bastogne-Liège, mais aussi des victoires dans Paris-Bruxelles, le Tour de Lombardie, la Flèche Wallonne, l’Amstel Gold Race. C’est le plus beau palmarès de toute l’histoire du cyclisme sur route et les flandriennes n’ont même pas encore été évoquées (ni la piste, avec les 6 Jours et le record de l’heure, ou le cyclocross, où il a également quelques bouquets, mais il semble impossible de faire une liste exhaustive de tout ce qu’il a gagné). Dans les Flandres, il a gagné 2 fois le Ronde (plus 4 places de troisième), 3 fois Paris-Roubaix (dont l’édition 1968, la première à contenir la tranchée d’Arenberg), 3 fois Gent-Wevelgem, 2 fois le circuit du Het Volk. Mais aussi le Championnat des Flandres, la course des raisins à Overijse, le prix de clôture à Putte, le Scheldeprijs, la Flèche Brabançonne. Un palmarès dans les Flandres hallucinant, pour un coureur qui s’imposait aussi énormément en Italie, en Suisse, en Espagne, aux Pays-Bas, en Allemagne et en France. S’il n’a jamais su faire le doublé Ronde-Roubaix, il a néanmoins deux triplés où le Ronde est aux côtés de Milan-Sanremo et de Liège-Bastogne-Liège en 1969 et 1975. Il est d’ailleurs le seul à avoir remporté 3 des 5 monuments la même année. Si Rik Van Looy et Roger De Vlaeminck, compatriotes et quelques années adversaires, ont aussi su s’imposer au moins d’une fois dans chacun des monuments, Eddy Merckx l’a accompli deux fois. Il aurait peut-être été plus rapide de lister ce qu’il n’a pas gagné. Dans les grandes classiques de son époque, il manque Bordeaux-Paris (à laquelle il n’a jamais participé), Paris-Tours et le championnat de Zurich. Dans les principales courses des Flandres, il ne manque que des victoires à Harelbeke et Waregem, dans le GP E3 et À travers la Belgique. Né d’une mère francophone et étant plus associé à Bruxelles qu’à la région flamande, il est dans ce classement derrière un quatuor entièrement flamand.
4ème : Roger De Vlaeminck, 126 points
Monsieur Paris-Roubaix, tout simplement. De 1969 (à seulement 21 ans) à 1982 il a toujours terminé dans les 7 premiers de l’épreuve (sauf en 1980, devant abandonner après une chute). De cette régularité inédite pour une grande classique, on peut même faire ressortir 9 podiums, dont 6 consécutifs. Il a remporté la reine des classiques à 4 reprises (un record) et en terminé autant de fois le dauphin, derrière Eddy Merckx, Francesco Moser et Bernard Hinault. Trois de ses succès sont acquis en solitaire dans le vélodrome Roubaisien, en 1972, 1974, et 1977. En 1975, il s’était imposé au sprint, profitant d’une erreur tactique d’Eddy Merckx, présumant de ses forces et lançant son effort à l’entrée du dernier virage, pour se faire doubler dans la ligne droite finale. À côté de cela, une seule victoire dans le Ronde, mais à l’occasion d’un doublé, en 1977, dont ont attendra un quart de siècle avant qu’il ne se reproduise. Un autre doublé a été réalisé, avec le Tour de Lombardie, qu’il considérait comme la plus grande des classiques, au même rang que Roubaix. Remporter ces deux courses n’a été fait que par 11 des plus grands coureurs de l’histoire et par seulement Gimondi et Moser la même année, en plus de lui. Courant longtemps pour des équipes Italiennes, il a remporté 2 fois ce Tour de Lombardie, 3 fois Milan-Sanremo et un cumul de 22 étapes sur le Giro (seul Merckx avec 24 a fait mieux chez les non-Italiens). En Belgique, il a aussi remporté la Flèche Wallonne et Liège-Bastogne-Liège, mais pas Gent-Wevelgem, malgré 4 places de deuxième. Il faut dire qu’il voyait cette classique comme une course d’entraînement pour Paris-Roubaix, s’ajoutant après la course encore 100 à 150 kilomètres de vélo, derrière derny, pour se préparer au mieux, étant coutumier de ces sorties de près de 400 kilomètres avant les classiques. Dans les Flandres, il a aussi gagné le Het Volk, à Kuurne, à Harelbeke, au Scheldeprijs et dans la Flèche Brabançonne, même si dans ses années Italiennes, il a moins couru dans ses Flandres natales du printemps à l’automne. L’hiver, en revanche, il y revenait constamment, pour aller remporter quelques succès sur piste (dont les Six Jours de Gand et ceux d’Anvers) et dans les labourés (avec des titres nationaux, en plus de succès Middelkerke, Diegem, Koksijde ou Overijse). Dans les deux cas, ce sont aussi des « classiques » de ces disciplines qui sont remportées. En cyclocross, il a même été sacré champion du monde. Sur la piste, il échouera au pied du podium mondial en poursuite individuelle. Il ne connaîtra pas non plus l’arc-en-ciel sur la route, avec au mieux une médaille d’argent, au sud de Namur, où il avait obtenu son premier titre de champion de Belgique, dès sa première année chez les professionnels.
3ème : Rik Van Looy, 133 points
Si son nombre de victoires exact varie selon les sources, celles-ci s’accordent à lui en donner plus de 370, faisant de « l’empereur d’Herentals » le coureur au palmarès sur route le plus large derrière Eddy Merckx. Le tout s’agrémentant d’autres très nombreux succès sur piste, avec des titres nationaux, les principaux Six Jours et divers omniums. Sur la route, il cumule 37 victoires d’étapes dans les grands tours, mais aucun classement général d’une grande course par étapes. Dans les classiques, en revanche, c’est un des plus beaux palmarès de l’histoire, avec les 5 monuments (seul à les avoir tous gagner avec Eddy Merckx et Roger De Vlaeminck. Mais aussi Paris-Tours, Paris-Bruxelles, le Scheldeprijs, le championnat des Flandres, le Het Volk, ainsi qu’à Harelbeke à 4 reprises (dont 3 consécutives) et de nombreuses semi-classiques Italiennes lors de ses années chez Faema, l’équipe qui accueillera plus tard Eddy Merckx, le tout adjoint à deux titres mondiaux consécutifs, ainsi à des victoires multiples dans les 3 grandes courses pavées, même si le pavé commençait à manquer à l’époque, avec notamment le premier triplé en 1962 (seulement réussi depuis par Tom Boonen, exactement 50 ans plus tard). Sur le Ronde, on avait alors très peu de bergs (comme évoqué pour précédemment dans le mois). Même si son premier succès s’est opéré après une attaque à Grammont, on ne grimpait pas jusque la chapelle et des regroupements assez conséquents avaient lieu par la suite. Dans Paris-Roubaix, ses 3 succès sont obtenues jusqu’en 1965, sur le parcours initial, qui s’élançait alors de la banlieue nord de Paris, sur lequel l’asphalte devenait de plus en plus présent, au point qu’il n’y ait plus qu’un cumul de 22 kilomètres en 1965. Depuis une décennie, on en était même réduit à chercher des côtes pour rendre le parcours plus difficile. L’année suivante, on déplacera le départ à Chantilly, permettant de tourner un peu plus dans la campagne en Pévèle pour retrouver un peu plus de pavés. En 1967, il aura un dernier podium à Roubaix, étant le dauphin de Jan Janssen dans un sprint à 10. Il franchira la tranchée d’Arenberg pour la première apparition de ce pavé l’année suivante, mais sans les capacités physiques pour peser sur la course, sa retraite approchant. Quant à Gent-Wevelgem, ses 3 succès en 1956, 1957 et 1962 permettent de parler un peu de l’épreuve et de son tracé, qui a souvent pris les côtes plus traditionnelles des Flandres, comme la montée de Kwaremont, déjà plébiscitée dans les années 1950, alors que le Kemmelberg n’est arrivé qu’en 1955. Le premier recentrage sur l’ouest des Flandres et sur les monts Français (avec passage par le Mont Noir, le Mont des Cats et le Mont Cassel) date se son second succès. En 1957, la course a lieu lors du même weekend que le Het Volk et les deux disciplines se partagent les monts : l’ouest pour Wevelgem et l’est pour le Volk. Ce partage ne dura que 3 ans, avant que la course retourne dans les Ardennes Flamandes. Le changement définitif aura lieu en 1962, avec un parcours allant vers les côtes de la Mer du Nord, puis concentrant ses difficultés dans l’Heuvelland, avec la colline de Kemmel. Sauf une exception en 1977, cette édition marque la création de Gent-Wevelgem telle qu’on le connaît aujourd’hui, avec comme vainqueur d’inauguration Rik Van Looy, en solitaire, pour son ultime succès à Wevelgem.
2ème : Tom Boonen, 145 points
Recordman des victoires à Paris-Roubaix, au Tour des Flandres, à Gent-Wevelgem et à Harelbeke, avec même un quadruplé inédit en 2012, histoire de magnifier un peu son second doublé Ronde-Roubaix, le premier l’ayant été par un titre de champion du monde. « Tornado » Tom Boonen s’est vite débarrassé du surnom de « Lionceau » en référence à son idole de jeune Johan Museeuw, qu’il a accompagné pendant un an et demi chez Quick-Step, après s’être révélé chez US Postal, avec une place de dauphin dans le dernier Paris-Roubaix couru sous la pluie en 2002, seulement battu par un Johan Museeuw impérial. Dans les autres grandes classiques, Tom Boonen n’aura jamais été victorieux, avec au mieux des deuxièmes places à San Remo et Tours et deux places au pied du podium à Hamburg. Les semi-classiques des Flandres lui allaient un peu mieux, que ce soit pour flahutes (trois fois Kuurne-Bruxelles-Kuurne, dont une édition d’anthologie en 2014, mais aussi À travers la Flandres) ou pour sprinteurs (le Scheldeprijs, le dernier « Paris-Bruxelles » et sa nouvelle forme de « Brussels Classic »). Ailleurs, il a notamment remporté la classique de Londres et brillé dans deux courses par étapes avantageant énormément les flandriens, avec la World Ports Classics, aux portes de la Flandre, et le Tour du Qatar, à l’autre bout du monde. On peut aussi lui citer ses 6 victoires d’étapes dans le Tour de France, plus un maillot vert et quelques jours en jaune en 2006, année où il a anéanti la « malédiction du maillot arc-en-ciel ». Il a aussi remporté 11 étapes du Tour de Belgique (plus que n’importe qui depuis le retour de l’épreuve en 2002), son classement général, deux titres nationaux et le premier titre de champion du monde par équipes dans le contre-la-montre en 2012, année de sa domination dans les flandriennes, avec notamment une échappée solitaire de plus de 50 kilomètres dans Paris-Roubaix. Dans Paris-Roubaix, il aurait pu rentrer un peu plus dans la légende l’an dernier, mais il échoue au sprint derrière Matthew Hayman, rescapé de l’échappée matinale, ce qui le prive de la première place de ce classement (qu’il pourrait atteindre selon les résultats des prochains jours). Dans le Ronde, il a « son » mont, le Taaienberg, dans lequel il a pris l’habitude de tester ses adversaires, au point que les flamands surnomment cette montée comme le « Boonenberg ». Cependant, en 2006, c’était dans le Koppenberg qu’il avait fait la différence, dans une image qui ne peut laisser aucun fan de cyclisme indifférent, tellement sa puissance contraste avec le passage de l’échappée matinale quelques secondes plus tôt et celui du reste peloton quelques secondes plus tard, avec le malheureux Juan Antonio Flecha, forçant la plupart des coureurs à monter le plus dur de la pente à pied. L’année précédente, il avait commencer à faire murir sa légende en lançant la lutte des favoris dans le Valkenberg, montée asphaltée de Brakel, la ville de Peter Van Petegem, un de ses adversaires, de l’épreuve qui arrivait alors encore Meerbeke, localité de la commune de Ninove, où réside l’Allemand Andreas Klier, un de ses autres rivaux, qui usera son coéquipier Erik Zabel par une attaque dans le Bosberg. On avait alors un groupe de 6 lancé dans Brakel et passant ensemble Grammont, pour qui il ne restait qu’à attendre un éventuel sprint massif. Avec Zabel clairement usé, le jeune Boonen, en infériorité numérique, semble de loin le meilleur sprinteur du groupe et pourrait attendre tranquillement la ligne droite finale. Mais comme il déclarera à l’arrivée : « on ne gagne pas le Tour des Flandres au sprint, on se doit de passer seul sous la flamme rouge ». Il contre ainsi une timide attaque de Peter Van Petegem à 9 kilomètres de l’arrivée, pour dominer ensuite un match à 1 contre 5 et s’imposer avec une quarantaine de secondes d’avance, pour son premier succès dans un monument. Une légende venait de naître.
1er : Johan Museeuw, 147 points
Pour seulement 2 petits points, c’est le dernier coureur à avoir été surnommé « le Lion des Flandres » qui termine en tête de ce classement. À son palmarès, on trouve 3 victoires dans Paris-Roubaix, avec le triplé Mapei de 1996 et ses victoires en solitaire en 2000 et 2002, auxquelles s’ajoutent 3 podiums, dont la place de dauphin en 2001, dans une course dominée par la Domo, dont il faisait partie, et gagnée par son coéquipier, pour un autre triplé d’une formation de Patrick Lefévère, le mentor de Johan Museeuw. Il s’est aussi imposé 3 fois dans le Ronde, en 1993, 1995 et 1998 et y a terminé à 5 autres reprises sur le podium (deux prestations record). Et s’il n’a jamais sur s’imposer à Gent-Wevelgem, il a gagné le GP E3 à Harelbeke, le dernier À travers la Belgique à Waregem (avant qu’il soit renommé À travers les Flandres), le circuit des Ardennes Flamandes à Ichtegem (avant que la course devienne les 2 Jours des Éperons d’Or, les 3 Jours de la Flandre-Occidentale, puis redeviennent une course d’un jour sous le nom À travers la Flandre-Occidentale), la Flèche Brabançonne (à 3 reprises), le championnat des Flandres (à 2 reprises), ainsi que les deux courses d’ouverture, le Het Volk et Kuurne-Bruxelles-Kuurne (à 2 reprises chacune). Rien qu’avec ça, c’est au moins une classique ou une semi-classique flandrienne gagnée chaque année de 1991 à 2003, sans avoir eu besoin de compter les 3 Jours de La Panne, ni même d’avoir eu à évoquer qu’il a porté le maillot jaune et remporté des étapes du Tour de France, qu’il a remporté l’Amstel Gold Race, le Championnat de Zurich et la Cyclassics à Hamburg (faisant de lui le seul coureur à avoir remporté 6 des 10 manches de la Coupe du Monde dans les années où elle était organisée), mais aussi qu’il est champion du monde et double vainqueur de la Coupe du Monde. En 1996, il réalise même le doublé entre les deux maillots arc-en-ciel (il faudra attendre deux décennies et Peter Sagan pour revoir un coureur en faire autant, même si le WorldTour a désormais remplacé la Coupe du Monde). Au-delà du palmarès, Johan Museeuw, c’est aussi la terrible chute dans la tranchée d’Arenberg en 1998, alors qu’il était le grand favori de Paris-Roubaix, une semaine après avoir dominé le Tour des Flandres en impressionnant tout le monde dans le Kapelmuur, ceci une semaine après avoir réalisé le doublé dans le weekend précédent, comprenant alors le GP E3 le samedi et la Flèche Brabançonne le dimanche. Si de nombreux coureurs sont tombés dans la tranchée, voire même de façon bien plus violente, ce qui a posé problème à Johan Museeuw, ce n’est pas uniquement le pavé, bien qu’il ait causé une fracture ouverte de la rotule, se retrouvant en 4 morceaux, c’est que ce genou a glissé jusqu’à du crottin de cheval, causant une grave infection, au point que l’amputation de la jambe ait été évoquée dans la semaine suivant cette chute. Et après cette chute, c’est le come-back, avec l’année suivante une 9e place, en ayant fait la course de l’arrière après que 3 de ses coéquipiers chez Mapei aillent faire un autre triplé sans lui, étant parti dans un groupe ayant créé une cassure dans cette même tranchée d’Arenberg, puis le succès obtenu en 2000, doublé d’une image aussitôt devenue légendaire et présente pour illustrer ce paragraphe, sur le coureur classé ici comme le meilleur flandrien de tous les temps.
Par Darth-Minardi & Carrefour de ‘lArbre
Crédit Photo : Matheus Katharus / Thomas Ducroquet / Laurie Beylier via flickr.fr