Les champs de bataille 14-18 à véloPour me rendre à Dunkerque, j'avais prévu de prendre le train, mais mes parents me proposent de m'emmener et d'en profiter pour visiter la région de leur côté. Le voyage en voiture se passe bien sous un temps assez maussade.
1er jour : Dunkerque - Ypres (80 km)Départ retardé à cause de la pluie. Le reste de la journée a été couvert, venté (dans le dos) mais sec. Une grosse partie du parcours s'est faite en Belgique où les routes étaient quasiment toujours doublées de pistes cyclables.
Je tombe sur un premier cimetière à Zuydcoote avec des tombes françaises, allemande, belges et britanniques. Je m'arrête. Même si j'ai programmé un certain nombre de site sur mon trajet, je me garde la possibilité de m'arrêter dans d'autres endroits quand je le juge intéressant.
Sur le chemin, le Boyau de la mort, le cimetière allemand de Langemark, le monument de Guynemer et le cimetière britannique de Tyne Cot. Ce dernier était vraiment le point d'orgue de la journée.
La visite du In Flanders Fields Museum a été en revanche assez décevant. C'est trop général.
J'ai vu beaucoup de cimetières et monuments sur la route, mais c'est vite devenu compliqué de s'arrêter à chaque fois.
Ce passage en Belgique aura été mitigé, il y a finalement beaucoup de différences avec la France. C'était un peu compliqué de se ravitailler, faute de boulangerie et de superettes. J'ai aussi été surpris du peu de personnes parlant français, je sais qu'on est en Flandre mais je n'étais qu'à 20 km de la frontière française.
2e jour : Ypres - Arras (120 km)Départ sous le soleil, ça change ! Le prix à payer était un petit vent de face. Parcours un peu plus vallonné que la veille sur des routes en état variable.
Beaucoup de monuments et de cimetières sur le parcours. J'ai du m'arrêter pour en voir une quinzaine et je suis passé à côté de nombreux autres sans m'arrêter. J'ai passé un peu de temps à Notre-Dame de Lorette.
La journée a été très internationale avec l'Irlande , la Grande Bretagne
, l'Australie , l'Inde , le Portugal
, la Tchécoslovaquie
, la Pologne
et le Canada
.
Je suis impressionné par les cimetières britanniques avec des tombes très travaillées et très bien entretenues, entourées de beaux monuments. Il y a beaucoup de monde pour les visiter, notamment des groupes d'étudiants.
J'ai un peu de mal à trouver mon rythme entre le vélo et les visites. J'ai l'impression de parfois visiter au pas de charge si je veux tenir mon planning.
Je suis agréablement surpris par Arras, avec une belle place et de jolies terrasses.
3e jour : Arras - Péronne (105 km)Journée avec un ciel couvert et toujours beaucoup de vent (avec un circuit qui tourne souvent, ça ne dérange pas trop) et quelques gouttes de pluie. Des rencontres cyclistes avec des sorties club le matin et le responsable des traits d'union européens (
https://ffvelo.fr/randonner-a-velo/ou-q ... dKLj1ZYTnQ)
Encore beaucoup de sites sur le parcours aujourd'hui. J'ai dû encore m'arrêter une quinzaine de fois et je suis passé à côté de beaucoup d'autres. Comme j'avais un peu moins de kilomètres j'ai pu prendre un peu plus mon temps. J'ai tracé tout mon circuit dans mon GPS, mais une fois sur le terrain, je prends quelques libertés (ce qui m’entraîne à faire un peu de gravel).
Toujours beaucoup de pays : Australie
, Terre-Neuve , Ulster , Grande-Bretagne , Pays de Galles et Afrique du Sud
.
De nombreux cimetières :
avec toujours des groupes de scolaires (non français).
Cette photo montre que les Britanniques sont toujours présents pour entretenir leur lieux de mémoire.
Le Commonwealth War Graves Commission (CWGC
https://www.cwgc.org/) fait vraiment un travail extraordinaire.
Le soir, je retrouve mes parents à Péronne pour le repas.
J'ai vu beaucoup de sites ces deux derniers jours et j'ai toujours cette petite frustration de ne pas y passer assez de temps.
4e jour : PéronnePas de vélo aujourd'hui
Visite de l'Historial de la Grande Guerre, un musée intéressant qui aborde les thèmes autour de la guerre.
Péronne est une jolie et agréable petite ville.
5e jour : Péronne - Soissons (125 km) Enfin le soleil dès le matin ! Pour la première fois du voyage, je pars sans gilet ni machettes. Par contre, j'ai toujours ce petit vent dans le nez.
A la sortie de Péronne je laisse à nouveau un petit cimetière britannique sur la gauche, ce sera sûrement le dernier avant longtemps (même s'il y a une tombe au cimetière de Soissons). Le début d'étape est assez monotone sur une grande route (dans trop de circulation) au milieu des éoliennes et des champs de betteraves. Juste une petite alerte avec une piqûre d'insecte sur le nez, sans conséquence a priori.
J'ai presque oublié ce que c'était de rouler longtemps avec tous les arrêts de ces derniers jours. J'ai 45 km avant mon premier arrêt, des tranchées que je ne trouve pas. Je passe ensuite par un cimetière franco-allemand à Thiescourt.
Je me ravitaille mais ne m'attarde pas à Noyon, une ville assez moche, et à la sortie de la ville je décide de suivre les pancartes plutôt que la trace GPS. J'ai bien fait car je roule au milieu d'une forêt ombragée sur une route très calme.
À la clairière de l'Armistice, je décide de visiter le musée car j'ai un peu plus de temps aujourd'hui. Le musée est sympa, plutôt moderne, mais un peu cher à mon avis.
Ce jour, j'ai nettement moins de site au programme et je trouve intéressant cette possibilité de visiter quelque chose en route, je pense que c'est le rythme à suivre.
Je fais un dernier arrêt à la nécropole nationale de Vic-sur-Aisne assez singulière avec ses tombes d’aumônier russe et du seul combattant chinois mort au front. Je fais le plein d'eau au cimetière d'à côté avant de finir tranquillement.
La journée a été chaude, je prends une bonne bière dans le centre de Soissons avant d'aller à mon hôtel qui est dans une zone commerciale.
6e jour : Soissons - Reims (125 km)Départ compliqué à cause d'une trace GPS mal préparée. Je me retrouve sur de jolies petites routes sans aucune voiture. C'est sympa même si ça me coûte 5 km. Je vais chercher un coup de tampon à Fère-en-Tardenois pour le BCN (
https://ffvelo.fr/randonner-a-velo/ou-q ... ZU3-3dZPt0). Je fonce ensuite vers le Chemin des Dames avec le vent dans le dos, un vrai bonheur.
Le matin c'était cyclo, l'après midi c'est tourisme. Je commence le Chemin des Dames par le fort de Malmaison où il n'y a rien à voir. Après une nécropole française un peu plus jolie que la norme à Cerny-en-Laonnois, je m'arrête à la Caverne du Dragon pour une visite guidée très sympathique. Comme la veille, je trouve sympa d'avoir le temps de faire une vraie visite. Le Chemin des Dames est assez agréable à vélo (à noter qu'une bande bleue sur les côtés accompagne toute la route). C'est assez bien indiqué, tout comme le Center Parcs local, ce qui, à mon avis, en dit long sur la culture de la mémoire française.
Les 30 derniers kilomètres sont par contre très très pénibles sur une grande route en ligne droite avec le vent de trois quart face. Un passage en montagne russe est un vrai supplice. L'arrivée dans Reims est aussi très chiante.
7e étape : Reims - Ste-Ménéhould (125 km) La météo annonçait de la pluie mais au réveil le ciel est clair. Je pars donc comme les autres jours en me disant qu'on verra bien en route. Je ne prendrait que quelques gouttes en fin de matinée.
Je commence par un petit tour dans la montagne de Reims au milieu des vignes. Des bornes indiquent les grandes maisons de Champagne (je n'ai pris en photo que celle en rapport avec le vélo).
Après quelques nécropoles françaises
je m'arrête à un cimetière russe
puis un cimetière franco-germano-polonnais
. Suit ensuite l'ossuaire de Navarin
. Au mémorial américain de Blanc-Mont, je monte au sommet de la tour . Je prends ensuite des petites routes très bucoliques pour aller à la Main de Messiges où une association aménage un site en recréant notamment les tranchées . C'est assez impressionnant.
Une belle journée au final. Pas de grosse visite mais j'ai pu passer du temps sur chacun des sites.
A Ste-Ménéhould, je me fais plaisir avec la spécialité locale : les pieds de cochon.
8e jour : Ste-Ménéhould - Verdun (120 km)La journée la plus dure depuis le début de mon voyage. Je parle beaucoup du vent depuis le premier jour, mais aujourd'hui c'était vraiment terrible pendant 40 km au milieu du parcours. Les sacoches offrent une grosse prise au vent, j'étais scotché. Déjà sans sacoche, j'ai l'impression d'avoir vraiment du mal à avoir de la puissance sur le plat, mais là c'est vraiment compliqué. 55 kg c'est super en montagne, mais sur le plat ça coince.
Avant ça, j'ai pris mon temps le matin. La traversée du massif de l'Argonne par la route de la Haute Chevauchée se fait par une route forestière très tranquille. On y trouve des abris, une nécropole, un monument, des zones aménagées...
Après le mémorial américain de Varennes-sur-Argonne, la bute de Vauquois mérite le détour. C'est bien aménagé et les cratères de mines sont impressionnants.
Si j'ai pris du vent de face, c'est pour aller sue la Voie Sacrée. Rien de bien extraordinaire, ça reste une route avec beaucoup de circulation, mais il fallait y passer pour le symbole.
9e jour : VerdunJournée de repos avec visite de Verdun. C'est une petite ville plus sympa que dans mon souvenir (j'y étais venu en 2005) mais il n'y a pas grand chose à y faire ou à voir. J'en profite pour faire une lessive. Globalement, les journées de repos, j'ai eu l'impression de ne pas faire grand chose et de tourner en rond.
10e jour : Verdun - St-Mihiel (140 km)Ce qu'il y a de bien en vélo, c'est qu'on a le temps de penser à plein de choses en pédalant. L'alerte vent fort annoncée pour vendredi après midi m'inquiète un peu vu le profil de mon étape. Après quelques kilomètres, je me dis que ce serait une bonne idée de s'avancer de 40 km jusqu'à St-Mihiel. Je raccourcis mon parcours initial et le temps de trouver un endroit où le réseau passe, je recherche et réserve un hôtel.
En dehors de ça la journée a été dense autour de Verdun : le Mort Homme
, la côte 304 , le Bois des Caures , Douaumont
, Vaux
... Il y a des choses à voir quasiment tous les 500 m. Je passe un peu de temps au Mémorial de Verdun, un musée assez moderne et plutôt bien fait, dommage que je n'ai pas plus de temps.
Je récupère mes sacoches pour finir l'étape. La fin est assez dure, j'ai l'impression de découvrir des muscles. Le vélo avec sacoches, c'est vraiment une autre façon de rouler.
St-Mihiel, c'est pas terrible, mais ça m'avance bien pour le lendemain.
11e étape : St-Mihiel - Nancy (90 km)Avant de partir, il faut que je tamponne pour mon BCN. A l'hôtel, il n'y a pas le nom de la ville sur le tampon. A la boulangerie, ils n'ont pas de tampon. La troisième tentative est la bonne dans un bar.
Départ directement dans le pentu. Même dans la pente je sens le vent, ça s'annonce bien. Dans la plaine, étonnamment, c'est moins violent... Je monte à la butte de Montsec par une route entièrement refaite, un vrai billard, encore meilleur qu'une arrivée du Tour de France. Beaucoup de sites se trouvent au sommet de bosses, ce qui s'explique militairement, mais qui entraîne un effort supplémentaire à vélo.
Je vais ensuite au cimetière américain de Thiaucourt. La classe à l'américaine ! Pelouse impeccable, tombes en marbre, du monde pour vous accueillir et répondre à vos questions... et même un tampon pour ma carte de route. Il y a du monde qui est en train d'entretenir le site, dont un qui enlève la mousse des arbres. A Montsec il y avait déjà quelqu'un qui enlevait les petites feuilles au souffleur. D'après les différents types de cimetières que j'ai pu voir, les nécropoles françaises font souvent un peu de la peine (je le dis sans gêne car je l'ai vu écrit sur un panneau explicatif en chemin).
Avant de redescendre sur Pont-à-Mousson, je m'arrête à une nécropole française un peu plus jolie que les autres avec quelques arbres.
L'arrivée sur Nancy est un peu pénible. Si je refais un voyage, j'éviterai les trop grosses villes.
Sinon, cet après-midi ça souffle fort à Nancy ! Je m'en suis bien tiré.
12e jour : Nancy - St-Dié-des-Vosges (115 km)Sequence émotion aujourd'hui avec le passage par la nécropole de Reillon où mon arrière grand père est enterré. C'est une petite nécropole franco-allemande avec des soldats allemands des deux guerres mondiales.
Avant ça le départ de Nancy se fait avec toujours un fort vent. Il est de trois quarts dos, heureusement, mais je ne suis pas très rassuré avec les rafales. La route que j'emprunte a une large bande d'arrêt et je suis plutôt en sécurité. Je passe par un monument et une nécropole avant Lunéville.
L'après midi me rappelle que je commence à fatiguer un peu, il est temps que ça se termine. Étonnamment, je me sens plus à l'aise dans les cols, les premiers du voyage. Je finis par la très jolie nécropole de La Fontenelle en grès des Vosges.
Depuis Lunéville, je roule "à domicile", sur des routes globalement connues.
St-Dié-des-Vosges, c'est assez sympa. C'est le genre de petite ville qui me plait bien pour m'arrêter.
13e jour : St-Dié-des-Vosges - Mulhouse (115 km)J'ai décidé d'annuler la dernière étape. Il est annoncé un temps terrible pour le dernier jour et je trouve un peu con de faire cette dernière étape sous la pluie à 50 km de chez moi.
Pour la première fois depuis le départ j'ai un peu de stress au début de la journée car j'ai un train à prendre. Je vise celui de 16h, car le suivant est à 18h. Normalement ça passe tranquille, mais avec le dénivelé, la fatigue et les arrêts, ça peut être juste.
Jusqu'à maintenant je prenais mon temps le matin, mais aujourd'hui je me presse un peu. Le petit déjeuner ouvre à 7h30 et je réussis à partir à 8h. Je dois prendre à manger car je ne trouverai probablement rien en Alsace aujourd'hui.
Je n'ai pas pris le temps de vérifier attentivement mes traces GPS et je me retrouve à naviguer dans des lotissements pour éviter la "grande" route. Je me trompe plusieurs fois et au moment où je me décide à la prendre, je trouve une sympathique voie verte.
Le premier col est assez long mais avec un pente raisonnable. Je trouve un bon rythme et j'ai de bien meilleures sensations que ces derniers jours. Ca me confirme dans mon idée que je suis maintenant beaucoup plus grimpeur que rouleur. Il faut aussi dire que je commence à bien connaître les routes des Vosges.
Je redescends pour remonter au col du Wettstein où se trouve une nécropole française. Un peu plus loin je passe rapidement au mémorial du Linge que je n'ai pas le temps de visiter. Un dernier cimetière allemand (j'y suis passé plusieurs fois sans y prêter attention) et c'est la grande descente sur Munster.
Le col de Firstplan est un peu plus dur mais ça passe bien. Il est un peu plus de midi et il me reste 35 km, je suis largement dans les temps, je roule même plus vite que sur les étapes "plates". Je me sens même nettement mieux que les jours précédents.
Mon dernier site sera le cimetière des prisonniers roumains de Spultzmatt, ça fait un drôle d'effet de se dire que c'est le dernier.
Peu après, je me sens en mesure de rentrer directement à Belfort, mais je préfère assurer et éviter la pluie, le ciel se couvrant. Je pense aussi que je suis un peu euphorique et qu'une fois passé les 120 km, ça peut être plus dur. Je savoure donc les derniers kilomètres autant que je peux le faire en traversant des zones commerciales et le centre de Mulhouse, mais là je connais un peu et ça passe mieux. J'arrive à 14h30 à la gare, largement dans les temps.
Le bilanQuelques chiffres :
- 13 jours dont 11 de vélo
- 1270 km
- 10 300 m de D+
- 61 h de selle
- Un peu plus de 100 sites visités
- Poids du vélo avec sacoches et bidons : 25 kg
- Budget : environ 110 euros par jour tout compris (hébergement, repas, visites, souvenirs...)
Je suis vraiment très satisfait de ce premier voyage en autonomie complète. J'ai fait ce que j'avais envie de faire en mixant vélo et tourisme historique. Je n'ai quasiment aucun regret sur des sites que j'aurai manqué. C'est conforme à mes attentes.
J'avais tout planifié avant le départ et c'est un vrai confort.
Au niveau des hébergements, pas de vraie mauvaise surprise. Pas de soucis avec les repas.
Niveau bagage, c'était parfait : ni trop, ni trop peu. J'avais pas mal réfléchis sur le sujet et je pense avoir trouvé le bon dosage.
Les points négatifs (hôtels moyens et arrêts dans les grandes villes) étaient connus à l'avance, donc pas de regret.
Pas de pluie, ça c'est un coup de bol. Mais j'ai l'impression d'avoir eu le vent dans la gueule 75% du temps.
Aucun problème mécanique, là aussi c'est bien.
Pour les améliorations éventuelles, si je recommence ce genre de voyage, j'essaierai de prendre du temps pour les visites l'après midi. Mon rythme idéal, c'était : départ à 8h30, repas acheté en boulangerie pour m'arrêter au bout de 60-70 km et prendre plus de temps l'après-midi avec une visite d'une heure pour arriver à destination vers 17h avec 120 km au compteur.
Niveau vélo, j'avoue que ça a été plus physique que je ne l'imaginais. J'avais fait déjà deux fois ce genre de voyage, mais jamais en autonomie. Le poids des bagages est un vrai "frein". J'ai l'impression d'avoir ressenti certaines sensations de fatigue que je n'avais pas ressenti depuis mes brevets de 1 000 km. J'avais l'intention de faire quelque chose d'un peu plus "sportif" l'an prochain, mais il faudra revoir la configuration.
Sinon, d'un point de vue touristique, je trouve assez honteux la façon dont la France gère son patrimoine mémoriel (à de rares exceptions).