Pierre Carrey dans Libération a écrit:Julien Pinot a longtemps cru à la pureté des chiffres avant de découvrir le versant humain. Il achève en 2014 une thèse de doctorat à l'université de Besançon, sous la direction de Frédéric Grappe, entraîneur en chef de la Groupama-FDJ. Ses travaux consistent à suivre la performance d'un cycliste sur le temps long. Le «profil record de puissance» modélisé pour chaque athlète permet de mieux guider vers les succès, mais aussi de détecter des anomalies : effets d'une maladie ou du dopage? L'entraîneur, qui officie alors avec les jeunes talents du CC Etupes, a la cote. «Certains jeunes coureurs étaient prêts à traverser la France pour travailler avec Julien, rappelle le directeur sportif de ce club près de Montbéliard, Jérôme Gannat. C'est le cas de Warren Barguil [le grimpeur de l'équipe Arkéa-Samsic, ndlr]. On lui proposait pourtant de meilleures offres ailleurs ! Mais Julien était déjà un entraîneur exceptionnel. Scientifique dans l'approche, il hébergeait aussi des coureurs dans son petit appartement. Il sent, il comprend, il donne beaucoup de lui sans jamais s'approprier la performance des coureurs.»
Avec une ligne rouge : le dopage. Julien Pinot est infle-xible jusqu'au beach-volley des vacances: «Il veut établir les règles d'entrée quand on est au bord de la piscine, pour être bien certain que tout le monde joue au même jeu», raconte Arnaud Menetrier, un ami de la fac. Autre souvenir d'été, il y a cinq ans dans le Var : «Le soir, on jouait au petit bac. Il fallait trouver un nom de sportif commençant par O. Je sors "O'Connor" parce que c'est un nom courant en anglais. Il devait bien y avoir un sportif qui s'appelait comme ça. On regarde sur Wikipédia et, effectivement, on trouve un rugbyman. Julien m'a reproché pendant trois jours d'avoir sorti ça au hasard ! Il aime gagner, il travaille dur pour ça, même pour les parties de pétanque. Mais ce ne sera jamais à n'importe quel prix.» L'intéressé confirme : «Les seules règles qu'il m'arrive de dépasser, ce sont les limitations de vitesse en voiture.» Il doute «souvent». S'est fait «trahir» quelques fois, comme par l'Autrichien Georg Preidler, qu'il entraînait et qui a avoué son dopage l'an passé.
Il scrute, circonspect, certaines performances adverses. Sachant que son frère n'est pas toujours battu par la maladie ou la malchance mais aussi par la chimie de quelques-uns. C'est son constat, pas une excuse. «J'ai régulièrement envie d'arrêter, dépité, mais j'aime trop le sport. Je fais ça pour Thibaut et pour les autres.» Son frère, 30 ans, pourrait prendre sa retraite dans deux saisons, à expiration de son contrat. Julien se voit prolonger, «au service d'un collectif». Après quoi, Romain Bouzigon, un autre ami rencontré à l'université, «l'imagine bien tenir une auberge. Il reviendra s'installer à Mélisey. Il aura un jardin bio. Ce sera de la bonne cuisine, très saine». ?
Bon, ça reste du Pierre Carrey dans son style très romancé. Mais le constat est là.